Interview ZONE BLANCHE / Thomas Couzinier & Frédéric Kooshmanian : ‘De la mélodie à des endroits précis plutôt que de l’ambiance partout’

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Propos recueillis par Benoit Basirico - Publié le 11-05-2017




Thomas Couzinier & Frédéric Kooshmanian signent la musique des 8 épisodes de 52min de cette série créée par Mathieu Missoffe, diffusée en avril 2017 à 20h55 sur France 2. Cette B.O a obtenue le FIPA d'or 2017 de la Meilleure musique originale.

A quel moment êtes-vous intervenus sur cette série ?

Frédéric Kooshmanian : Au tout début, pour l'appel d'offre (car il y a eu un casting), on a fait des thèmes à partir d'un pitch et d'une photo de tournage. Puis on a ensuite travaillé à partir du montage, sur l'image. On essaie toujours d'illustrer une image, c'est ce qu'on fait aussi dans la pub. Mais on a voulu donner des choses qui nous ont été inspirées par le scénario, et par la photo. On a pu proposer 17 thèmes, que les monteurs ont pu utilisés à leur guise. C'était bien de travailler en amont.

Thomas Couzinier : En effet, on s'est retrouvé avec quatre heures de musique, beaucoup de thèmes et d'éléments à gérer... C'est le fruit d'une réflexion sur l'évolution des thèmes pour l'ensemble de la série, par rapport aux personnages, aux lieux, à diverses choses, c'était un travail complexe.

Avec qui la collaboration a t-elle eu lieu ?

T.C : La collaboration s'est faite avec les deux réalisateurs (Thierry Poiraud et Julien Despaux), avec le producteur (Vincent Mouluquet), ainsi que le créateur de la série (Mathieu Missoffe). C'est un travail d'équipe, et d'échanges sur les idées narratives et musicales.

F.K : Et aussi avec François Hitter de France 2. C'était important de travailler avec tout le monde. Tout le monde donnait son avis. On proposait des choses, puis on rectifiait après les retours.

D'où vient l'idée du banjo pour le thème principal ?

T.C : La série est entre le polar, le fantastique, le western. Et c'est pour convoquer ce dernier que l'idée du banjo est arrivée. Mais il est interprété de manière inattendue, il amène une sonorité étrange, qui reste dans l'oreille, mais au final il n'est pas si présent en terme de minutage. Il y a aussi de l'orchestre et quelques sonorités électroniques. On voulait qu'il y ait de la mélodie (que ce ne soit pas uniquement du drone tel qu'on en trouve dans les films d'horreurs) et des sonorités typiques qui puissent être reconnaissables. Il y a un nouveau thème à chaque épisode, qu'il soit associé à un lieu ou à un personnage.

F.K : L'idée au départ était de créer un décalage par rapport au sérieux de la série. Les cordes du banjo nous faisaient penser à l'écorce des arbres, à la nature, on est parti de matières acoustiques plus que synthétiques. C'est une série où la nature a une grande place. On a aussi détourné l'instrument, qui est normalement un instrument accompagnateur, en l'utilisant en solo. Il y a aussi le côté intemporel, on n'a pas une idée précise du temps où se déroule l'action.

L'enjeu était-il d'instaurer une unité de la série sur les 8 épisodes ?

T.C : Pour cela, on reprend les mêmes éléments, les même thèmes, mêmes sonorités, mêmes instruments. On voulait un choix restreint d'instruments. Le banjo y participe, avec les cordes, les synthés... On voulait des cordes intimistes, frottées, pour donner une couleur, une unité, cela donne une réminiscence et une dimension surnaturelle. On a composé beaucoup de choses à l'image pour les premiers épisodes, puis à partir des épisodes 5 ou 4, les réalisateurs ont pu puiser dans les 2h de musique qui avaient été faites.

F.K : La série a plusieurs strates. On a travaillé sur les personnages principaux, sur la ville (Villefranche) qui était un personnage à part entière, et la forêt qui se distingue comme un protagoniste. On a aussi travaillé sur le major, sa fille, la disparition de la fille du maire, et au fur et à mesure on a etteillé chaque musique. On a fait des croisements de thèmes quand les personnages se croisaient.

Comment s'est décidé l'emplacement de la musique ?

F.K : On essaie de mettre de la musique aux endroits où elle apporte quelque chose. On est pas partisan de mettre de la musique à tout prix. Et on voulait en effet qu'il y ait de la mélodie à des endroits précis, plutôt que de l'ambiance partout. L'idée n'était pas juste de créer un décor musical, mais de créer une identité.

T.C : Ce sont les monteurs images qui faisaient l'essentiel des placements, incluant les musiques préexistantes, mais ce "spoting", ce calage de la musique, n'était pas définitif, il y avait aussi un échange là-dessus. On ne s'est pas privés de longues plages harmoniques, notamment pour les scènes de la grotte.

Pour finir, quels sont vos goûts en matière de musique de film ?

T.C : On aime beaucoup Angelo Badalamenti, Howard Shore pour Cronenberg, mais on a pu écouter pour la série des choses larges, pas de références précises.

F.K : On aime les grands mélodistes, comme Morricone ou Sakamoto. La mélodie permet au spectateur de mieux s'identifier, de rentrer dans l'image. Et avec cette série, on pouvait se permettre beaucoup de choses, c'est ce qui nous a plu.

 

 

Propos recueillis par Benoit Basirico

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