Retour sur le concert de James Newton Howard à Pleyel, entre concert intimiste et show à l’américaine

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Texte et photos : Julie Issartel - Publié le 21-11-2017




C'est incontestable, depuis quelques années les concerts de musique de film et les ciné-concerts rencontrent un succès toujours grandissant dans les salles de spectacle. Hans Zimmer, Ennio Morricone, Ludovico Einaudi, Danny Elfman ... désormais de plus en plus de compositeurs n'hésitent plus à se la lancer sur scène. La musique de film enfin considérée comme un art en soi ? Sans doute, en tout cas James Newton Howard a su en convaincre la salle Pleyel le vendredi 10 novembre.

 James Newton Howard était en concert à La Salle Pleyel de Paris pour une date unique le vendredi 10 novembre 2017 pour interpréter, pour la première fois, ses musiques en live, avec un orchestre symphonique et un chœur.


Comment James Newton Howard a séduit Pleyel...

Moins culte qu'Ennio Morricone, moins connu (pour ne pas dire omniprésent) que Hans Zimmer, JNH se trouve dans une sorte d'entre-deux qui ne garantissait ni salle pleine ni franc succès. Et pourtant. Le public s'est laissé surprendre par un spectacle et surtout un compositeur subtil et plein d'humour. Véritable personnage, JNH a su construire un spectacle qui regorge d'intelligence, entre concert intimiste et show à l'américaine. Il ne s'est pas contenté d'une simple exécution de son répertoire, mais nous fait véritablement revivre les moments clefs de son répertoire et des films auxquels il a contribué. Oui, contrairement à Hans Zimmer ou Ennio Morricone pour ne citer qu'eux parmi les concerts récents, le compositeur a véritablement utilisé l'image pour que le spectateur soit complètement immergé dans les différentes atmosphères cinématographiques, et soit finalement submergé par l'émotion. Sans tomber dans l'excès du ciné-concert, l'image survient et s'efface avec beaucoup de justesse, dans une sorte de question/réponse extrêmement bien maîtrisée. Et là encore, le compositeur se démarque en osant jouer autre chose que ses « grands tubes » mélodiques : le spectateur passe du frisson de l'émotion (qui atteint son climax lors de « The hanging Tree » - chanson de "Hunger Games", et de la musique de "Blood Diamond") au frisson de l'angoisse quand retentissent les thèmes du "Sixième sens" ou de "Signes". JNH a ainsi fait ce que peu de compositeurs de musique de film osent faire en concert : une set list variée qui explore toute la palette des émotions.

Mais le plus important est que JNH n'a pas conçu ce spectacle pour flatter sa musique. A vrai dire, il peine même à utiliser le terme de "carrière" pour qualifier son œuvre. Non, il s'agit pour lui de revenir par sa musique sur des films et surtout sur des personnalités phares qui l'ont aidé. La démarche, humble, consiste à dire merci à ceux qui lui ont donné sa chance (Elton John, Shyamalan...), avec qui il a collaboré (Hans Zimmer), ou simplement de rendre hommage à des actrices avec qui il a eu le plaisir de travailler (Julia Roberts, Barbara Streisand). Le concert ressemble alors à une sorte de macro bande annonce de l'œuvre du compositeur. Finalement une véritable mise en bouche qui donne absolument envie de se replonger dans les différents films cités (même ceux qui ne sont pas forcément des chef- d'œuvre...).

« Un compositeur de musique de film doit savoir raconter des histoires. J'ai appris à en raconter tellement que j'ai décidé de raconter la mienne ce soir »

L'originalité de ce spectacle tient aussi en ce qu'il est profondément humain, et c'est sans doute cela qui a conquis un public pourtant timide au début du spectacle. Dès qu'il prend la parole, JNH fait rire son public. C'est quelqu'un de spontané qui n'a pas peur de l'autodérision : il s'amuse des petits boulots par lesquels il est passé, des remarques incongrues que les gens lui font parfois, ou encore des couacs du spectacle. Loin d'une mécanique trop bien huilée, le compositeur préfère digresser à propos de son parcours, de ses faiblesses, et amène ainsi convivialité et spontanéité au concert. Il ose parler de ses échecs (son premier jet pour la musique du "Village"), et, chose rare dans ce genre de concert, ose jouer la partie de son œuvre antérieure à son travail pour le cinéma pour rappeler qu'il n'est pas réductible au septième art. Mais attention, comme Montaigne le faisait dans ses "Essais", s'il parle de lui, ce n'est qu'à titre d'exemple: il ne parle pas forcément de soi, mais plutôt du métier de compositeur de musique de film. Quelles sont les difficultés du métier ? Comment y arriver ? Comment se passe la collaboration réalisateur/compositeur ? Autant de questions auxquelles il répond par des anecdotes toutes plus amusantes les unes que les autres ou en commentant son effigie animée. « Un compositeur de musique de film doit savoir raconter des histoires. J'ai appris à en raconter tellement que j'ai décidé de raconter la mienne ce soir » déclare-t-il à son public. Oui mais finalement, le compositeur va bien au-delà, et ne raconte pas son histoire, mais celle d'un des métiers les plus fascinants qui soit. Difficile alors de ne pas se laisser prendre par ce conte musical et cinématographique qu'on ne saurait que recommander.

Texte et photos : Julie Issartel

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