Rencontre Henri Langlois 2010 : Nicolas Saada fait sa leçon de cinéma et nous parle musique de film

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- Publié le 08-12-2010




Nicolas Saada a été invité par le festival des films d'école de Poitiers pour animer la Leçon de cinéma, qui a pour thème la direction d'acteur. Le cinéaste, pour cet exercice, a choisi de baser sa leçon sur la pratique car il met en scène, en y apportant ses propres modifications, une séquence du film Les 39 Marches d'Hitchcock. C'est l'occasion pour le réalisateur de ESPION(S) de nous parler de la musique de film américaine.

Dans sa leçon de cinéma, Nicolas Saada ne souhaitait pas faire un remake de la scène d'Hitchcock, mais de se servir de cette scène comme point de départ pour créer sa mise en scène. Participe à ce projet l'acteur Grégoire LePrince Ringuet, mais aussi des figurants et des spectateurs. En effet, Nicolas Saada à travers cet exercice souhaite faire participer toute la salle. Cela passe ainsi pas un dress code imposé pour cette leçon (être vêtu de noir et blanc).

A cette occasion, il a répondu à quelques questions concernant la musique de film.

Interview

Cinezik : Pensez-vous déjà à la musique avant vos tournages, de la même manière y avez-vous pensé avant de faire cette leçon de cinéma ?

Nicolas Saada : Même si le film de notre leçon de cinéma, à l'arrivée, méritera peut être une mise en musique, une virgule musicale, c'est au départ un film peuplé par le son du public, l'atmosphère de cette salle, la résonance. Pleins de choses se jouent qui ne seront pas forcément de l'ordre de la musique. Cet exercice est vraiment un saut dans le vide partagé (avec le reste de l'équipe).
Le cinéma, c'est de la musique déjà, c'est mélodique. Un choix de plan c'est déjà comme un choix de note, lorsque l'on passe d'une valeur large à une valeur serrée, d'un gros plan à un  plan beaucoup moins serré... Hitchcock disait par exemple que s'il était sur un plan large et qu'il passait sur un plan serré, c'est comme s'il était sur l'orchestre et que d'un seul coup résonnait la cymbale. Il y a déjà une musique du découpage. C'est pour cela qu'avec le chef opérateur on a essayé des choses toute la journée pour mesurer comment on va rythmer la scène, comment on va trouver la musique de cette scène sachant qu'on ne va pas en faire une copie conforme.

Ce qui est aussi très important dans les films d'Hitchcock, c'est la musique de Bernard Herrmann. Actuellement, quel binôme réalisateur / compositeur trouvez-vous le plus pertinent ?

Nicolas Saada : Je trouve que Spielberg / Williams c'est quand même bien, ça continue à être très efficace. Almodovar / Alberto Iglesias aussi, ils ont vraiment trouvé quelque chose. Tim Burton / Danny Elfman évidemment, mais il y en a d'autres. Howard Shore / Cronenberg, c'est une collaboration absolument magnifique.

Trouvez-vous une différence entre le travail des compositeurs anglo-saxons par rapport aux compositeurs français ?

N.S : Je trouve qu'aujourd'hui en France, on a des techniciens, des réalisateurs, des artistes, des compositeurs... qui sont, à cause de la mondialisation des moyens de travail de composition, équivalents aux anglo-saxons. Techniquement aussi bons. Meilleurs qu'il y a vingt ou trente ans. Beaucoup de compositeurs français travaillent à l'étranger, Nicolas Errera, Alexandre Desplat, Gabriel Yared, ils sont de plus en plus nombreux. Les gens ont peur de la mondialisation, mais je pense que la mondialisation mondialise le talent. Et c'est vraiment bien.

Pensez-vous qu'au niveau des thèmes et des structures, il y a une certaine tendance ?

N.S :  Non, je crois effectivement qu'il y a aujourd'hui beaucoup de compositeurs américains qui travaillent en France, par exemple, j'ai travaillé avec Cliff Martinez sur ESPION(S). Il y a quelque chose de très codifié dans la musique anglo-saxonne, qui je pense habille différemment les images. Alors quelques fois, cela peut entraîner des excès.  Il faut s'en méfier. J'ai travaillé avec Cliff Martinez parce qu'il y avait quelque chose chez lui de très climatique, qui je pense se prêtait bien au film que je voulais faire et en plus, comme il est anglo-saxon et qu'une grande partie du film se passe en Angleterre je pensais que c'était nécessaire d'avoir un compositeur anglo-saxon. Maintenant, une musique speed de film américain sur un film français ce n'est pas toujours forcément la bonne entrée pour un film, mais ça dépend vraiment du film.

 

A la suite du Festival, Nicolas Saada se rendra trois jours à la Fémis pour travailler avec les étudiants autour de la musique et du cinéma. Au programme, des projection des films (Espion(s), Virgin Suicides de Sofia Coppola avec la présence du groupe Air) et de discussions autour de la musique de film, de la manière d'intégrer de la musique dans un film.


Floriane Jenard
Photo : Sébastien Laval

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