POP REDEMPTION, un cri d’amour à la musique décloisonnée

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- Publié le 04-06-2013




Après deux court-métrages, le réalisateur Martin Le Gall retrouve le compositeur Franck Lebon pour son premier long-métrage. Cette comédie relate les aventures de quatres copains membres d'un groupe de rock satanique. La BO mèle chansons métal et musique orchestrale. Décryptage.

Interview Martin Le Gall / Franck Lebon / Steeve Petit

Martin Le Gall, réalisateur

Cinezik : Parlez-nous de la genèse du projet de POP REDEMPTION ?

Martin Le Gall : C'est un film que j'ai co-écrit avec Mark Eacersall et Alexandre Astier. L'idée de départ me vient d'une période durant laquelle je tournais un court-métrage avec des comédiens costumés. On allait tous les midis manger dans une cantine d'entreprise. Comme les comédiens n'avaient pas le temps de se changer pour aller manger, ils y allaient tous avec leur perruque, leur costume Louis XIV. La situation était un peu absurde. Cette image d'univers décalés m'est restée.

En plus de çà, c'était une époque où il y avait des pubs pour l'Eurostar. Le slogan c'était "Londres au rabais". Il s'agissait de photos assez géniales de sosies complètement ratés. Il y avait entre autres une photo de sosies de Beatles. Les figurants avaient tous un «petit air de» mais qui en réalité ne ressemblaient pas du tout à la star. Et du coup, mon esprit s'est mis à divaguer sur cette photo des Beatles et sur cette histoire de sosie qui avait l'air de s'excuser d'être là. Je me suis demandé quelle pouvait être la vie de ses Beatles ratés. C'est donc de cette manière que j'ai commencé à écrire le début de mon histoire: un groupe de Métal en cavale qui doit se cacher de la police et qui décide de se déguiser en Beatles. Les musiciens transforment alors leur physique sans vraiment maîtriser ce qu'ils font.

Pourquoi l'idée d'un groupe de métal ? Êtes-vous particulièrement proche de cette musique ?

M.L.G : Non pas spécialement. C'est vraiment parti de cette photo. J'ai cherché avec Mark Eacersall, mon co-scénariste, le point le plus éloigné de ce que peut représenter la pop culture. On a donc pensé au Métal. Et sachant qu'il y a plusieurs styles à l'intérieur du genre Métal, nous avons opté pour le style "Black Métal" qui est selon nous le style le plus éloigné de la culture de la pop music.

Je voulais faire un film sur l'ouverture d'esprit, l'ouverture d'esprit musicale bien sûr mais aussi l'ouverture d'esprit au sens large. Le film est un grand écart entre la pop et le Métal, pour faire un raccourci. Franck Lebon, le compositeur du film, avait émis l'idée de travailler avec un co-compositeur vraiment spécialisé dans la musique Métal, à savoir Steeve Petit du groupe «Zuul FX».

Franck Lebon, compositeur / Steeve Petit, chanteur du groupe Black Métal «Zuul FX»

Comment fait-on pour mêler plusieurs styles musicaux dans un seul et même film?

Franck Lebon: La première question qu'on s'est posée était comment allons-nous traiter l'histoire de ce groupe de Métal qui allait devoir jouer un concert «pop» alors qu'il n'en a jamais joué pour ensuite finir par jouer une musique mêlant les deux styles musicaux. Fallait-il partir d'un morceau Métal et l'adapter en Pop ou l'inverse ? Nous avons décidé de commencer à travailler sur une partition Pop. J'ai donc commencé à composer une mélodie qui pouvait s'adapter à la musique Métal par la suite.

Steeve Petit : En fait, le Métal est issu de la Pop et du Rock, comme c'est expliqué un moment donné dans le film. Donc il était plus logique que l'on travaille d'abord sur des riffs de pop pour la transformer par la suite en Black Métal.  

F.L : Après avoir composé ces chansons, il fallait faire une musique de film qui soit cohérente et qui ne nous fasse pas aller dans un autre univers. On a testé énormément de choses. Je me suis dit qu'on devait se tourner vers de la musique orchestrale avec une touche «gothique» pour que la musique soit universelle par le coté orchestral. On a gardé certains de ces morceaux. Mais le plus important était d'évoluer dans la musique en même temps que les personnages évoluent dans leur musique dans le film. Il fallait suivre leur voyage musical. J'ai donc composé des morceaux plus pop pour la deuxième partie du film.

Steeve Petit, parlez-nous de votre travail de coach musical pour les acteurs ?

S.P: La grande gymnastique dans tout ceci était de faire jouer différents styles de musiques à des comédiens qui n'avaient jamais touché un instrument de musique pour la plupart. Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, le jeu était plus complexe sur la Pop music que sur le Black Métal. A la fin du tournage, j'ai été très impressionné par les acteurs qui n'étaient plus des comédiens jouant leur rôle de musicien, mais ils étaient musiciens. Vers la fin du film, les acteurs doivent jouer sur une des scènes du mythique «Hellfest», un des plus grands festivals de Métal d'Europe. Je pense qu'on a vraiment bien travaillé sur le coaching. Les comédiens ont assuré sur scène et ce sont fait accepter du public, ce qui n'était pas gagné!

Sachant que c'est un film «sur» la musique, donc un film très musical, comment ne pas en faire trop, comment trouver le juste équilibre ?

F.L: Le juste milieu on ne le trouve pas ! ( rires). C'est-à-dire qu'on le cherche tout le temps.

On le cherche jusqu'à la dernière heure de mixage. Et c'est cet équilibre qui est le plus compliqué dans la musique de film selon moi. Ce sont les projections «test» avec les producteurs qui nous donnent l'opportunité d'avoir du recul. Et c'est à ce moment-là que tu ressens si cette musique-là est en trop ou s'il en manque. On a même changé la musique du logo de la «Gaumont» pour qu'il y ait une réelle unité musicale dans le film. Jusqu'au dernier moment, on travaille sur cet équilibre.

SP : Ce que je trouve intéressant dans ce film-ci, c'est qu'il y a beaucoup de relief musical puisque l'on passe par différents genres musicaux. On n'a donc pas cette sensation d'être submergé de musique tout au long de la projection. Il y a un terrible travail d'alchimie musicale.

Connaissiez-vous particulièrement le Métal ou le Hard Rock avant ce film?

F.L : Pas spécialement. J'en avais écouté un peu. Mais c'est surtout grâce à Steeve qu'on a pu composer précisément dans ce style. On voulait faire du «vrai» Black métal et non pas un pastiche.

S.P : L'alchimie a fonctionné tout de suite avec Franck. Au départ j'avais peur que mon style musical soit caricaturé. Ce film permet d'ouvrir le spectateur à une musique qu'il ne connait sans doute pas et qui lui semble au départ peut-être difficile d'accès.

Martin Le Gall : Le film est un cri d'amour à la musique décloisonnée, décomplexée et ouverte d'esprit. On ne pouvait donc pas être dans la caricature. Et Franck Lebon est quelqu'un de riche musicalement. Il puise dans plein de styles différents. Sur la musique Black Métal, on devait être très précis et s'entourer de gens spécialistes de cette musique. Le film parle d'une ouverture d'esprit musicale. Au départ, le groupe part avec des oeillères, un esprit un peu étroit. Et petit à petit, il s'ouvre à une musique plus large. En plus, dans la vie, l'aventure de ce film a permis aux comédiens de découvrir énormément de choses, dont l'apprentissage d'un instrument de musique. Entre les compositeurs aussi, il y a eu beaucoup d'échanges et donc de réelles découvertes chez chacun d'entre eux.

Interview réalisée en mars 2013 par Hélène Van Loo
Dans le cadre du Festival d'Aubagne.

 


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