The Looney Tunes (Jerry Goldsmith), renaissance de l'enfant Intérieur

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par Quentin Billard

- Publié le 01-01-2008




Après plusieurs années d'attente, le duo Joe Dante/Jerry Goldsmith se reforme de nouveau pour la 8ème fois après notamment "Gremlins" (1984), "Explorers" (1985), "Les Banlieusards" (1989), "Gremlins 2: La nouvelle génération" (1990), "Small soldiers" (1998). 

Pour 'Looney Tunes', le maestro fait un retour fracassant dans le monde de la musique de film, après s'être fait discret quelque temps. Il faut dire que la santé du compositeur laisse quelque peu à désirer ces derniers temps (il est atteint d'un cancer et suit une chimiothérapie). Pourtant, le score de 'Looney Tunes' nous fait clairement comprendre que le maestro n'a pas perdu son âme d'enfant et semble être en pleine forme. Si les récents 'Star Trek: Nemesis' ou 'The Sum of All Fears' laissaient un peu à désirer sur le plan de l'inspiration, 'Looney Tunes' nous permettra de retrouver un Goldsmith à l'inspiration débridée, dans la lignée de ses oeuvres fantaisistes pour 'Gremlins', 'The 'Burbs' ou 'Matinee'. L'humour délirant du film a permit au compositeur de se lâcher en élaborant une partition où la folie orchestrale côtoie un très fort sentiment d'aventure et de bonne humeur. 'Life Story' commence ainsi en introduisant la fameuse fanfare de Carl Stalling. La deuxième partie de 'Life Story' permet à Goldsmith d'amorcer un style plus mickey-mousing sautillant. Aucun doute possible, on est ici dans l'univers des cartoons de la Warner!

Et c'est l'arrivée de Bugs Bunny dans l'amusant 'What's Up?' où le compositeur amorce un motif au xylophone très inspiré du thème de 'La danse russe' du 'Petrouchka' de Stravinsky. C'est aussi l'occasion pour le compositeur de commencer à manier ses différents effets orchestraux afin de créer un univers sonore où fraîcheur et humour ne font qu'un. Quant à cette petite allusion 'classique', il faut plus la voir comme une sorte de clin d'oeil aux musiques des cartoons américains des années 50/60, où il était fréquent d'entendre des compositeurs comme Milt Franklyn, Carl Stalling ou Scott Bradley faire de multiples références à des thèmes célèbres de la musique classique dans leurs partitions 'mickey-mousing'. Dans 'Another Take', DJ découvre que son père a été kidnappé. Goldsmith nous introduit très rapidement à un style plus 'musique pour films d'agent secret', avec batterie, basse et guitare, dans un style entre les musiques des 'James Bond' et des 'Austin Powers'. A noter ici l'utilisation amusante d'un violon larmoyant (cf. la scène pour comprendre). On pourra entendre une brève pause intime pour piano et cordes dans 'Dead Duck Walking' (le titre fait ironiquement allusion au film 'Dead Man Walking') lorsque Kate et DJ se parlent brièvement, après la séquence du crash de la voiture volante dans le désert. 'Out of The Bag' prolonge les effets orchestraux délirants du compositeur avec l'utilisation de cette basse jazzy évoquant l'univers musical et très codifié des films d'agents secrets (cf. 'The Man Who Knew Too Little' de Christopher Young).

La folie des toons est un prétexte habile pour les délires orchestraux du compositeur. Un morceau comme 'Blue Monkey' (découverte du 'diamant bleu' dans une atmosphère très 'Raiders of The Lost Ark') s'apparente à un style 'aventure' plus sérieux (à noter ici l'utilisation plus sombre des cuivres) mais n'a que peu de poids face à la plupart des pièces délirantes du score. Dans 'The Bad Guys', l'un des meilleurs morceaux du score, Goldsmith utilise installe une ambiance orchestrale mouvementée, très proche de Stravinsky et Bartok. Il s'agit de la poursuite à Las Vegas avec Sam le pirate et ses sbires. Goldsmith utilise ici une petite rythmique de batterie/basse/guitare dans un style proche de ses musiques western des années 60/70. Des cors quasi chevaleresques installent un grand climat d'aventure entraînant par-dessus la rythmique 'western' de la pièce (le personnage de Sam est un cow-boy), une nouvelle bonne idée à noter dans cette brillante partition pleine de fraîcheur et de fantaisie. On retrouve cet esprit dans 'Car Trouble' pour la poursuite en voiture dans les rues de Las Vegas. A noter l'utilisation très cool de la batterie et de la guitare électrique dans 'Thin Air' tandis que 'Area 52' utilise quelques sonorités électroniques bizarres pour pasticher cette ambiance fantaisiste des musiques des vieux films de science-fiction.

'We've Got Company' est un nouveau morceau d'action alternant entre rythmiques à la 'James Bond' et effets sonores délirants, dans la lignée des expérimentations de 'The 'Burbs', pour une nouvelle scène d'action du film. Le thème principal, installé par le compositeur depuis le début du score, est décliné en de multiples variantes tout au long du film. Il évoque avec légèreté les déboires du personnage de DJ et de ses amis. On le retrouve sous une forme plus lente dans 'I'll Take That', où le compositeur utilise un accordéon pour les premières séquences à Paris (les vieux clichés ont la vie dure). Cette ambiance 'à la française' se prolonge dans 'Paris Street' écrit sous la forme d'une petite valse pour accordéon et guitare dans la lignée du thème de 'Papillon'. On notera l'utilisation du motif des méchants dans 'Free Fall', lorsque DJ sauve Kate des griffes de Mr.Smith (Bill Goldberg) sur le toit de la Tour-Eiffel. Le morceau prend une tournure 'action' plus sérieuse avec ces cordes agitées, ce martèlement de timbales et ces trombones/cors à la 'Star Trek: Nemesis', l'occasion de nous rappeler à quel point Jerry Goldsmith est décidément un grand maître de la musique d'action.

On retrouve cette ambiance massive dans 'Tasmanian Devil' pour la séquence avec Taz (à noter ici l'utilisation des timbales). Le thème revient au passage dans 'Jungle Scene' (traversée de la jungle du diamant bleu) tandis que 'Pressed Duck' évoque l'affrontement avec Marvin pour le satellite, illustrée en partie avec des cuivres très 'virils' et de la percussion martiale. A noter que c'est John Debney qui a écrit la partie finale du score, Jerry Goldsmith n'ayant finalement pas été en mesure de terminer à temps la partition du film (John Frizzell aurait d'ailleurs écrit quelques pièces pour certaines séquences animées). Malheureusement, la partie de Debney n'est pas incluse sur le CD, et ce même si le compositeur cite son nom dans les remerciements. Au final, 'Looney Tunes: Back In Action' apparaîtra très vite comme la nouvelle surprise d'un compositeur toujours au sommet de son art, qui retrouve une dernière fois Joe Dante pour une partition pleine d'humour, de références musicales ironiques (allusion au thème des 'Gremlins' dans 'Out of the Bag') et de délires orchestraux en tout genre. La musique apporte à son tour une dose incommensurable d'énergie par-dessus les images du film de Dante. Elle stimule notre imagination et nous entraîne dans une nouvelle aventure agitée, Dante et Goldsmith semblant s'être vraiment bien amusé sur cet excitant projet. Avec 'Looney Tunes: Back In Action', Jerry Goldsmith retrouve aussi son âme d'enfant et nous offre ici ce qu'il a fait de mieux au cours de ces 5 dernières années. Une partition orchestrale pleine d'énergie et de fraîcheur, que tous les fans du maestro se doivent de découvrir de toute urgence!

par Quentin Billard


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