Goldfinger (John Barry), l'Art du Symbolisme Musical

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par François Faucon

- Publié le 17-02-2014




Première collaboration entre le compositeur John Barry et le réalisateur Guy Hamilton. "Goldfinger" est le troisième opus de la saga James Bond mais le premier sur lequel John Barry a eu la totale maîtrise de la partition.


L'album est premier dans les classements en 1965 et remporte, la même année, un Grammy Awards de la meilleure bande originale. Tout ça pour un album de trente minutes dans la version américaine ; trente-huit dans la version britannique. N'importe... Bricusse, l'un des paroliers, ira même jusqu'à comparer le travail de Barry pour ce film, à une peinture de Van Gogh.

Pour la chanson d'ouverture, John Barry récupère en partie un thème (plus vraisemblablement, un motif et quelques accords) composé par Johnny Mercer et Henry Mancini en 1961 pour le film Diamants sur Canapé (Oscar de la meilleure musique de film) : "Moon River", interprété par Audrey Hepburn dans le film.

Toujours est-il que le travail de John Barry prouve toute l'intelligence du maître et sa capacité à concilier étroitement la musique et le texte. A ce niveau-là, certains n'hésitent pas à parler d'un "symbolisme mélodique" en droite ligne de celui de J. S. Bach !

Il est vrai que cette chanson est d'une précision qui fait frémir, aujourd'hui encore. Et pour une fois, c'est bien du méchant dont il s'agit dans le générique ; pas du héros !

La chanson générique mélange, avec une rare adresse, le "James Bond theme" et celui de "Goldfinger".

Le "James Bond theme" est interprété par une formation classique à laquelle John Barry rajoute une batterie jouant un rythme de jazz : le chabada. Le thème est exposé à la guitare et accompagné par des cordes "aux mouvements chromatiques".

Empruntant au jazz, cuivres, vents et contrebasses jouent sur le deuxième et le quatrième temps. L'entrée de Shirley Bassey permet de jouer sur le contraste : face à la formation classique, une voix à la limite de crier .

Compositeur génial, John Barry utilise un accord très particulier pour représenter Oddjob , le valet assassin d'Auric Goldfinger ; accord accompagné d'un martèlement aux cymbales à doigts (finger cymbals) qui souligne, de façon très ironique, la force de frappe du valet.

Oddjob est un valet froid comme le métal ; matière que l'on retrouve systématiquement évoquée au travers de l'or, du chapeau mortel ou des barreaux de la scène de combat final avec 007. Oddjob est l'antithèse de James Bond et "son" accord est en conséquence une version transposée en mineur de l'accord initial du Gunbarrel.

L'intelligence du compositeur se retrouve tout au long du film. En effet, à trop avoir axé son travail sur la réussite de la chanson-générique, John Barry manque de temps pour composer le reste de la musique. Le nombre de mélodies s'en ressent et le compositeur doit utiliser d'autres méthodes. Ainsi, dans "Down Raid on Fort Knox", John Barry fait preuve d'un symbolisme musical de génie. La réserve d'or américaine doit être attaquée par l'aviation privée de Goldfinger menée par Pussy Galore. D'entrée, le compositeur affirme les premières notes du thème de "Goldfinger" (0'17) accompagnée par les cordes jouant un ostinato chromatique et descendant (0'25). Puis, à partir de 1'00, ce même ostinato est transpercé (il n'y a pas d'autres mots) par des accords de trompettes sur fond de percussions. Le raid contre Fort Knox est en cours, et le rappel systématique des premières notes du thème de "Goldfinger" rappelle qui est le maître d'œuvre de ce plan.

Alors ? Goldfinger, un indépassable moment de musique bondienne ? Peut-être bien.

 

par François Faucon


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