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Nudes (2024)
- Série - BO : ROB (Robin Coudert), Nousdeuxtheband, Paul Sabin
Stella est amoureuse (2022)
- Film - BO : Nousdeuxtheband
Madame Claude (2021)
- Film - BO : Nousdeuxtheband
Sex Doll (2016)
- - BO : Nousdeuxtheband
Confession d'un enfant du siècle (2012)
Confession of a Child of the Century - - BO : Nousdeuxtheband
Stella (2008)
- - BO : Nousdeuxtheband
"Stella s’exprime à travers les mots de Sheila, de Gérard Lenorman… ensuite elle découvre Lavilliers... puis quand elle trouve sa place... c’est sa voix à elle".
Cinezik : Le film est autobiographique (votre propre voix s’intègre même à la chanson de Stella). Jusqu’où avez-vous poussé cette démarche ?
Sylvie Verheyde : J’ai eu l’idée de ce film lors de l’entrée de mon fils en sixième. Ce qui m’a frappé, c’est la différence entre son entrée en sixième et la mienne. Lui, c’est un bon élève. On habitait le cinquième. Il rentrait dans un bon collège, de façon tout à fait normale. Cela m’a ramené à ma sixième à moi : comme Stella, j’habitais dans un café. Cela m’a ramené à la place de l’école pour moi, et à la question de savoir comment l’école avait changé. C’est le point de départ. Après, je l’ai fait comme mon autobiographie, c’est vraiment mon histoire. Puis, quand on écrit et quand on filme, la fiction intervient, ne serait-ce que dans la manière de repositionner ses souvenirs, la chronologie, plein de choses. Mais les faits sont réels.
Aviez-vous une tranche d’âge précise comme cible ?
En fait, je ne ciblais rien du tout. Après, il y a un point de vue : je filme à hauteur d’enfant, pour essayer de retrouver les sensations de l’enfance. Je trouve que c’est ce qui donne son ton positif au film. Qu’il lui arrive des galères ou pas, elle a en tout cas cette énergie, cette innocence que l’on a quand on est petit. Après, il y a la construction, les thèmes abordés dans le film, qui sont évidemment des thèmes adultes. Le film a été au Festival de Venise, où il a beaucoup plu. Je me suis rendu compte qu’il y avait plein de gens qui l’aimaient pour des raisons très différentes. Il y avait des publics très différents : ça plait aux ados, ça plaît aussi aux quarantenaires. Je me suis rendu compte que le public était assez vaste.
Au sujet de Leora Barbara, qui incarne Stella, il y a peut-être un parallèle à faire entre l’actrice et le personnage. Comme Stella, elle est propulsée dans un monde adulte, celui du cinéma, des plateaux de tournage… Comment a-t-elle vécu cette expérience ?
Je l’ai choisie à l’instinct. Je l’ai vue en casting et j’ai su tout de suite que c’était elle. Elle avait une manière particulière d’être, de ne pas jouer à l’enfant, de ne pas être en démonstration, de ne pas faire son intéressante. Je me suis rendue compte petit à petit, lorsqu’elle a lu le scénario, qu’elle avait des raisons de le comprendre. Je pense donc que je n’ai pas tourné à son insu. C’est une petite fille qui est très mure, qui a l’air super fragile comme ça, mais qui ne l’est pas. Je me suis aussi rendue compte que sa mère avait eu sensiblement la même enfance que moi. Il y avait des éléments qu’elle comprenait instinctivement, qui faisaient partie de son histoire. Elle n’était pas plongée dans le monde adulte dans les mêmes conditions que Stella.
Nourrissiez-vous cependant une inquiétude à confier le rôle principal d’un long-métrage à un enfant ?
Oui. On a forcément une inquiétude, puisqu’on sent qu’on maîtrise moins bien les choses. Mais j’organise beaucoup de répétitions avant le film, pour ensuite laisser les acteurs très libres sur le tournage, car j’aime bien ce qui s’y passe en plus. Au fil des répétitions, j’avais été hyper rassurée par Leora : elle comprenait, était juste, elle intériorisait vraiment les situations. Leora a été un élément extrêmement fiable sur le tournage, j’ai su que je pouvais compter sur elle. Le tournage était difficile, c’était quand-même dans un café, avec plein d’adultes, avec des heures de tournage un peu longues… et elle a été hyper résistante, hyper pro !
Leora Barbabra s’inscrit dans un casting varié, comprenant beaucoup de parcours différents. Il y a Benjamin Biolay qui est chanteur, il y a des acteurs qui ne sont pas « vraiment » acteurs…
J’ai créé un mélange, aussi bien dans le café qu’à l’école. Dans le café, il y a des acteurs connus : Benjamin Biolay, Guillaume Depardieu ; Karole Rocher et Jeannick Gravelines qui ont déjà joué dans mes films ; et puis il y a aussi le patron du bar, mon directeur de prod’… Il y a un mélange.
Sur le papier, ça peut sembler hétéroclite, et à l’image, ça dégage finalement beaucoup de naturel…
Ce qui est vraiment particulier au café, c’est que ce sont des habitués qui se voient tous les jours, qui se répondent, se font des blagues… Il y a un univers de la vanne, quoi. J’ai voulu créer comme ça une bande où je puisse me dire que si j’allume la caméra, ça marche, même en dehors des dialogues et des scènes écrites. Comme pour l’école : il y a des vrais acteurs, Christophe Bourseiller, Valérie Stroh… Et puis il y a une vraie directrice d’école, un vrai prof…
Pour créer la familiarité du café, la présence de Guillaume Depardieu paraît essentielle. On sait qu’il appréciait cet univers, qu’il fréquentait lui-même des cafés… L’avez-vous convaincu facilement d’aller vers ce rôle là ?
Oui, assez facilement. En fait, il y a eu un malentendu avec son agent : comme le rôle du père était un peu plus important et que Guillaume était un acteur très connu, il pensait que c’était pour ce rôle là. Puis je lui ai expliqué que je le voyais plutôt en « prince charmant » dans le film, et il a été facile à convaincre. Sa disparition m’a rendue vraiment triste… Mais ce que je me dis, c’est que dans Stella, il a une image hyper lumineuse, généreuse, tendre, loin de la violence. Généreux et tendre, il l’a été sur le tournage.
Guillaume Depardieu et Benjamin Biolay semblaient avoir des destins croisés : ce dernier est un chanteur qui se dirige vers la comédie, et Guillaume, c’était l’inverse… Est-ce qu’il y avait une interaction entre eux deux à ce niveau-là ?
Pas spécialement. Ce qu’ils ont en commun, et c’est ce qui m’intéresse chez les gens, c’est que ce sont des gens compliqués. Aussi bien Benjamin que Guillaume : à facettes multiples, capables de faire plusieurs choses en même temps…
Vous aviez déjà travaillé avec Benjamin Biolay sur "Sang Froid"...
J’avais pensé à lui – il n’avait jamais rien fait en tant qu’acteur – en le voyant à une émission de télévision, et justement, j’avais retrouvé cette complexité. Il avait une image de chanteur rive gauche, et quand il parlait je me disais : « c’est un peu discordant, c’est bizarre »… Sa complexité m’intéressait, donc je l’ai contacté, et j’ai fait un téléfilm avec lui.
De même, vous aviez déjà travaillé avec Karole Rocher, par exemple. Eprouvez-vous le besoin de vous appuyer sur des personnes que vous connaissez-déjà ?
Oui, je préfère : il y a des raccourcis qui se font plus vite. Et puis, comme je possède un univers un peu particulier – en l’occurrence c’est l’univers du café, donc un univers un peu marginal -, il y a des repères qu’on a plus facilement avec les gens qu’on connaît. Et puis il y a le fait que Karole ait été serveuse, je peux m’appuyer sur des gestes à elle dont j’ai connaissance, et qui enrichissent le personnage.
Il semble qu’il soit de plus en plus compliqué de produire un film aujourd’hui. Le fait que Stella ait gagné le Prix Arlequin du Meilleur Scénariste 2006 a-t-il joué un rôle déterminant dans l’avancée du projet ?
Oui, ça a joué un rôle déterminant. Avec ce type de projets, qui sont des projets fragiles (il n’y a pas de grande vedette, ni de sujet hyper porteur…), tout compte. J’ai eu le CNC, ensuite j’ai eu ce prix… Il y a un ensemble de petites choses qui m’a fait arriver à avoir Arte, et finalement le film s’est fait avec le CNC, Arte et Canal +.
Un point sur la musique. Dans Stella, vous réutilisez essentiellement des tubes de variété. Selon vous, peuvent-ils jouer le même rôle à l’image qu’une composition originale ?
Dans le cas de Stella, c’était important. C’est une petite fille qui vient d’un milieu où il n’y a pas vraiment de vie culturelle, où on ne lit pas, où on ne va pas au cinéma… Chez sa copine Gladys, qui vient d’un bon milieu, dans le salon il y a une bibliothèque, alors que chez elle, il y a un Juke Box… La variété, au premier degré - sans décalage du genre « c’est marrant la variété » - c’est un peu les mots qu’elle trouve pour s’exprimer. Au début du film, elle s’exprime à travers les mots de Sheila, de Gérard Lenorman… Ensuite elle découvre Lavilliers, qui est un chanteur un peu plus « sérieux »... Et quand elle se trouve sa place, la musique composée prend le pas : tout d’un coup, c’est sa voix à elle. Plus elle s’affirme, plus elle parle à travers sa propre voix.
Pour vos deux premiers longs-métrages (Un frère et Princesses), vous aviez collaboré avec Philippe Sarde, qui avait justement composé, en 1983, la bande originale d’un film intitulé « Stella » (de Laurent Heynemann). Cela ne vous est donc pas venu à l’idée de faire appel à lui pour ce film ?
Pour ce film-là, non. Puisque c’est déjà un film des années 70, et que Philippe Sarde a marqué cette période vraiment fortement, je n’avais pas envie de tomber dans la nostalgie facile en faisant appel à lui - que j’adore !
Comment cela s’était-il passé avec lui, sur les deux premiers films ?
Super bien ! J’adore Philippe. Il a travaillé gratuitement sur mon premier film : il avait vu un premier montage, et il avait adoré. Quand j’étais petite, j’adorais la musique de Ron Carter, notamment dans Le Choix des armes – une musique de Philippe Sarde, mais avec Ron Carter à la contrebasse… Et il avait fait venir Ron Carter de New-York pour mon film. Ca s’était passé merveilleusement bien. C’est quelqu’un de talentueux…
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