Rebelle (Patrick Doyle), le compositeur inspiré par l'Ecosse

rebelle,doyle, - Rebelle (Patrick Doyle), le compositeur inspiré par l'Ecosse


par Sylvain Rivaud

- Publié le 09-07-2012




L'écossais signe pour le nouveau film d'animation Disney/Pixar un score réussi aux accents celtiques sans perdre sa personnalité. Analyse du disque piste par piste.

Brillante idée que de convoquer l'écossais Patrick Doyle pour ce film se déroulant dans une écosse médiévale, le musicien semble à l'aise avec les cornemuses et les violons, et les paysages et personnages de l'histoire semblent l'avoir inspiré puisqu'il signe ici un excellent score, beaucoup plus personnel que ses précédentes participations hollywoodiennes telles que THOR ou LA PLANETE DES SINGES : LES ORIGINES.

Le compositeur expose dès le début du film un très beau thème aux accents celtiques, qui évoque la magie de l'histoire à venir et le caractère noble du personnage de Mérida. Cette exposition du thème, malheureusement, n'est pas présente dans le disque, qui après les chansons du film placées au début du CD (assez dispensables), enchaîne sur "Fate & Destiny", très beau morceau dans la plus pure veine romantique de Doyle, évoquant la sensibilité et la noirceur du thème d'amour de FRANKENSTEIN. "The Games" illustre le début des jeux censés désigner le prétendant de Mérida, la princesse rebelle. Doyle emploie tambours et percussions comme il l'avait fait dans HARRY POTTER & LA COUPE DE FEU pour illustrer la Coupe du Monde de Quidditch. "Remember to Smile" est une récréation à la cornemuse et à la flûte, pour l'aspect protocolaire et folklorique des scènes avec les différents clans des royaumes.

"Merida Rides Away" commence par une chevauchée sauvage (Merida s'enfuit du château) et progressivement devient plus mystique et magique (l'apparition des feux-follets). Doyle reste très classique mais parfaitement dans le ton du film, dans le rythme des scènes et en accord avec ce qu'évoquent les images. "The Witch's Cottage" permet de passer d'une ambiance mystérieuse à un ton plus léger, plus amusant, plus aérien aussi, évoquant l'excentrique sorcière. Doyle lui assigne un thème sautillant aux cordes, un peu farfelu, qui bascule de l'humour à l'inquiétude en quelques notes. L'écriture des cordes rappelle le style du compositeur écossais (on pense en particulier à HARRY POTTER 4). Le motif de la chevauchée sauvage présenté dans le morceau précédent revient furtivement. Doyle prouve ici sa capacité à passer d'une ambiance à l'autre dans un même morceau avec subtilité et à utiliser des thèmes à bon escient, tradition musicale clairement encouragée chez Pixar alors qu'elle est en désuétude, malheureusement, dans beaucoup d'autres productions actuelles.

"Song of Mor'Du" est une réjouissante chanson écossaise interprétée par les personnages masculins du film. On l'entend brièvement dans le film, c'est une chanson hommage à l'ours Mor'Du qui a attaqué le père de Merida pendant son enfance et a arraché un pied à celui-ci. "Through The Castle" est un morceau dans le style du "mickey-mousing" propre aux films d'animations, léger et sautillant, mêlant suspense et humour, pour la séquence très réussie de l'évasion du château. Doyle utilise beaucoup les bois et les flûtes en pizzicatos, tandis que la cornemuse reprend le thème de la chanson de Mor'Du. Un autre motif est une déclinaison du thème de la sorcière, évoquant son maléfice ici en action.

"Legends are lessons" est un morceau doux aux bois et aux cordes, tantôt léger, tantôt très mélancolique, parfois d'inspiration médiévale, dont la mélodie évoque le thème principal. La seconde partie du thème fait ici son apparition, très ample et noble (on pense à BRAVEHEART de James Horner), tandis que la partie exposée au tout début du film est brièvement reprise au violon solo à la fin. "Show Us The Way" retrouve le mysticisme de l'épisode précédent avec les feux-follets et développe l'ambiance inquiétante lorsque Mérida s'enfonce dans la forêt. Le morceau se termine par un énergique passage d'action aux cuivres trépidants qui, sans bien sûr l'égaler, évoque furtivement l'excellent morceau "The Creation" du FRANKENSTEIN de Doyle.

"In Her Heart" fait progresser le film vers un ton plus émouvant et délicat, plus classique et plus "Disney" aussi, puisqu'il est ici question de beaux sentiments. Une évolution confirmée par la chanson "Noble Maiden Fair", qui reprend le thème principal au violon solo, tandis que les personnages chantent en gaélique sur cette même mélodie. C'est l'occasion pour Doyle d'exploiter tout le potentiel émotionnel de son thème et on ne peut que s'en réjouir, d'autant plus que dans le film l'effet lacrymal et nostalgique fonctionne à merveille. C'est l'inévitable petite touche Disney/Pixar.

"Not Now" et "Get The Key" sont des morceaux du climax de l'histoire, alternant action/aventure (avec envolées de cuivres et morceaux de bravoure percussifs) et suspense plus "mickey-mousing". On retrouve bien le style d'action/aventure de Patrick Doyle, qui bien sûr ré-utilise les thèmes précédemment exposés. "We've Both Changed" boucle ce climax avec émotion, avec une superbe reprise chantée du thème, symbolisant la réunion des personnages.

Au final, environ 52 minutes du score de Doyle sont présents sur le disque, soit l'essentiel de son travail pour le film, lui-même d'une durée modeste (1h35). A la première écoute on retiendra surtout le thème principal, pleinement exploité, et le beaux travail sur les chansons intégrées au score. Dommage en revanche que les chansons de Julie Fowlis et Birdy tranchent tellement avec le reste et nous rappellent la période gnan-gnan des Disney chantés. Cet écueil avait semble-t-il été mieux résolu dans RAIPONCE, un Disney sans Pixar qui était certainement plus audacieux que ce REBELLE qui n'a de rebelle que le titre. Ce léger manque de prise de risque se ressent inévitablement dans la musique de Patrick Doyle qui, tout en restant parfaitement efficace et adaptée au film, décolle rarement et n'explore aucun sentier vierge. Reste son magnifique thème, qui restera certainement dans la mémoires comme l'un des plus beaux entendus au cinéma en 2012.

par Sylvain Rivaud


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