Cannes 2019 : Interview B.O avec Amine Bouhafa (LE MIRACLE DU SAINT INCONNU, Semaine de la Critique)

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Propos recueillis par Benoit Basirico - Publié le 20-05-2019

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Amine Bouhafa, le compositeur césarisé pour TIMBUKTU, signe la musique de ce film marocain, premier film de Alaa Eddine Aljem.

Cinezik : Comment s'est faite la rencontre avec le réalisateur ?

Amine Bouhafa : Avec le réalisateur on s'est rencontré dans un festival de cinéma. Il m'avait dit depuis le début de notre rencontre qu'il n'aimait pas utiliser de la musique dans ses films. On a parlé surtout de nos affinités de cinéma. Il venait de finir son tournage et quatre mois plus tard je reçois un mail me disant qu'il aimerait beaucoup que je regarde son film. Je l'ai donc vu et je l'ai directement appelé pour lui dire que j'aimais beaucoup et que je serais ravi d'en composer la musique.

Quelle a été l'approche musicale ?

A.B : Il y a une certaine ironie, un certain ton de comédie dans son film, mais il ne voulait pas du tout que la musique aille dans ce sens, qu'elle souligne les moments de comédie. Il ne voulait pas de musique fonctionnelle. Il était sensible à l'argument de l'utiliser pour apporter ce qu'on ne voit pas à l'écran, pour ramener le non-dit, je jouais une troisième dimension, une sorte de sous-texte, de deuxième grille de lecture. Il était aussi sensible au fait de l'utiliser avec parcimonie, le film n'avait pas besoin de beaucoup de musique, il avait surtout besoin d'un arc, d'une structure, de dynamisme, d'identité sonore. Il était sensible à ce genre d'idées, on a directement trouvé un terrain d'entente rapide. Le process de fabrication était extrêmement rapide.

De quelle nature était cette collaboration ?

A.B : Il était très très ouvert. Il m'avait très humblement dit depuis le début que c'était sa première expérience de musique avec un compositeur. Il était à l'écoute, à partir du moment où on s'était dit que la musique ne devait pas souligner les moments de comédie, ne devait pas souligner ce qu'on voyait à l'écran, il était à l'écoute. Je lui ai proposé les emplacements (spotting), qui a ensuite beaucoup évolué. Au début il voulait 4 ou 5 moments de musique et on s'est retrouvé avec une quinzaine. Au fur et à mesure on voyait qu'on avait un peu plus besoin d'amener un fil conducteur. C'était vraiment une expérience très très agréable.

Quel est le rôle de cette musique qui s'est imposé ?

A.B : Le film avait besoin de cet arc narratif musical, que les thématiques soient amenées petit à petit, au début par 2 ou 3 instruments, puis déclinées avec d'autres instruments, avec des contrepoints, pour parvenir à la fin à avoir le thème développé d'une manière beaucoup plus fournie et riche instrumentalement.

Quelle est l'interprétation ?

A.B : Je me suis entouré de 3-4 musiciens. Mes arrangements ont été directement enregistrés avec des vrais musiciens. On a travaillé les maquettes à partir d'une vraie matière musicale. Il y a un accordéon, qui n'est pas joué sous la forme d'un accordéon traditionnel, il joue des motifs répétés, avec des effets sonores de souffle, il y a même deux accordéons qui se répondent. C'est un instrument qu'on n'utilise pas beaucoup dans le cinéma parce qu'il a souvent été cantonné à son image folklorique et musette, alors que c'est un instrument qui a beaucoup d'autres couleurs et registres.

Le film est tourné dans de larges paysages qui ont pu inspirer la musique...

A.B : Il y a un côté western caché dans le film, donc j'ai essayé un peu, sans appuyer, d'amener cet aspect, avec le son de l'accordéon, comme alternative à l'harmonica.

Etait-il question aussi d'épouser le point de vue du personnage ?

A.B : Le point de vue de musique n'est pas uniquement concentré sur un point de vue de personnages. Il n'y a pas un thème rattaché au personnage, c'est plus une construction de couleurs autour de ce village.

Quelle était la direction du réalisateur ?

A.B : Sur son film, il savait très bien ce qu'il ne voulait pas, et d'une manière très humble et très généreuse, il m'a dit qu'il me faisait vraiment confiance, que c'était moi le maître de mon art, qu'il ne saurait pas me dire techniquement ce qu'il aimerait, mais qu'il saurait me dire ce qu'il n'aime pas. C'est extrêmement agréable parce que cela ouvre une perspective de collaboration, cela ouvre un univers de cinéma et on est invité à lui proposer des choses.

Avait-il des musiques de références ?

A.B : Aucune musique temporaire ni de références, on est vraiment allé à l'essentiel en composant la musique du film depuis le début. C'était vraiment une expérience extrêmement agréable.

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Propos recueillis par Benoit Basirico

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