christine,carpenter,@, - Christine (John Carpenter, 1983), la feraille animée par les sons electroniques Christine (John Carpenter, 1983), la feraille animée par les sons electroniques

christine,carpenter,@, - Christine (John Carpenter, 1983), la feraille animée par les sons electroniques


par Benoit Basirico

- Publié le 20-09-2019




Avec l'adaptation du roman de Stephen King, Christine, John Carpenter ne se contente pas de s'asseoir dans le fauteuil du réalisateur ; il reprend également sa place derrière les synthétiseurs. Après une collaboration mémorable avec Ennio Morricone sur The Thing, Carpenter renoue avec sa signature musicale, une partition électronique minimaliste qui a défini le son de ses œuvres précédentes telles que Assault on Precinct 13 ou Halloween. Pour donner vie à la relation toxique entre le jeune Arnie et sa Plymouth Fury 1958 maléfique, le réalisateur-compositeur tisse une toile sonore hypnotique. Le motif principal, lancinant et synthétique, épouse parfaitement la carrosserie froide et métallique du véhicule, tout en traduisant l'obsession grandissante et la transformation inquiétante du protagoniste.    

La simplicité est redoutablement efficace. Plutôt que de miser sur une orchestration complexe, Carpenter privilégie des lignes de basse analogiques profondes et des nappes de synthétiseurs éthérées qui créent une atmosphère de tension constante et de menace latente. Le choix des sonorités électroniques n'est pas anodin ; il confère à la voiture une âme artificielle, une conscience froide et calculatrice. La musique devient l'extension sonore de Christine, son souffle mécanique et son grondement intérieur. Chaque note semble animer l'inanimé, transformant la tôle et le chrome en une créature vivante et organique, une approche qui préfigure brillamment le travail de Brad Fiedel sur Terminator l'année suivante.

La force de la bande originale réside dans sa symbiose parfaite avec l'image. La musique de Carpenter n'accompagne pas seulement l'action, elle en est une composante essentielle. Les thèmes musicaux surgissent aux moments clés, lorsque la voiture s'auto-régénère ou que ses phares s'illuminent dans la nuit, nimbant ces scènes d'une aura surnaturelle et quasi divine. La partition souligne avec une subtile mélancolie l'isolement d'Arnie, sa crise d'adolescence qui se mue en une dépendance morbide à cette machine. La musique ne se contente pas d'illustrer la peur ; elle exprime la solitude d'un jeune homme qui trouve un refuge pervers dans la puissance destructrice de son automobile.

La collaboration entre le réalisateur et le compositeur est ici totale, puisque les deux sont une seule et même personne. Cette fusion permet une cohérence artistique rare, où chaque décision de mise en scène trouve son écho dans la partition. Carpenter utilise sa musique comme un outil narratif à part entière, distillant le suspense et amplifiant le caractère fantastique du récit. Cette approche introspective garantit que la musique ne submerge jamais le film, mais qu'elle en renforce la psychologie trouble et l'esthétique léchée. La vision de Carpenter est unifiée, où le son et l'image s'entremêlent pour forger une expérience cinématographique singulière et immersive.

La bande originale de Christine se distingue par son audacieux mariage entre la composition électronique originale et une sélection de classiques du rock 'n' roll des années 50. Des morceaux comme "Bad to the Bone" de George Thorogood ou "Little Bitty Pretty One" de Thurston Harris, diffusés par l'autoradio de la voiture, créent un contrepoint ironique et macabre lors des scènes de meurtre. Ce décalage saisissant entre l'innocence apparente de ces chansons d'époque et la brutalité des événements à l'écran ajoute une couche de cynisme terrifiant. Cette dualité sonore, opposant la chaleur nostalgique du rock à la froideur implacable des synthétiseurs, encapsule parfaitement la double nature de Christine : un objet de désir vintage devenu une icône de l'horreur moderne.



par Benoit Basirico


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