simetierre,goldenthal, - Simetierre (Elliot Goldenthal, 1989), dissonances terrifiantes et mélodie enfantine Simetierre (Elliot Goldenthal, 1989), dissonances terrifiantes et mélodie enfantine

simetierre,goldenthal, - Simetierre (Elliot Goldenthal, 1989), dissonances terrifiantes et mélodie enfantine


par Benoit Basirico

- Publié le 22-09-2019




Pour sa première collaboration avec la réalisatrice Mary Lambert, le compositeur Elliot Goldenthal s'attaque à l'adaptation de "Simetierre", l'un des romans les plus sombres de Stephen King. Cette partition représente l'une de ses premières incursions majeures dans le cinéma grand public, marquant un tournant dans sa carrière. En signant cette œuvre à l'âge de 35 ans, Goldenthal ne se contente pas d'illustrer une histoire d'horreur ; il explore en profondeur la tragédie familiale qui en constitue le cœur, posant ainsi les bases d'un style qui deviendra sa signature dans le cinéma de genre.

L'approche musicale est articulée autour d'un thème central en forme de valse. Ce leitmotiv lancinant est intrinsèquement lié au deuil, ses notes mélancoliques traduisant la douleur et le chagrin de la famille Creed. Cependant, Goldenthal confère à cette ritournelle une dimension étrange, presque foraine, qui transforme le cimetière indien en un espace à la fois féerique et macabre. Ce choix audacieux crée une ambiguïté fascinante, où la tristesse se mêle à une promesse de merveilleux corrompu, berçant l'auditeur dans une fausse quiétude avant de le confronter à l'horreur.

Le choix des instruments est fondamental pour construire l'atmosphère terrifiante du film. Dès que le récit bascule dans l'effroi, la partition se fracture en une série de dissonances savamment orchestrées. Les cordes stridentes, un piano aux accords menaçants, des carillons enfantins devenus effrayants et des sonorités électroniques texturales instaurent une tension insoutenable. Pour les scènes d'action et les montées dramatiques, Goldenthal déchaîne des lignes de cordes et de piano frénétiques, soutenues par des percussions métalliques agressives. Cette instrumentation riche et complexe tisse une toile sonore où l'émotion, l'effroi et l'action s'entremêlent de manière inextricable.

La relation entre la musique et l'image est symbiotique, la partition épousant chaque nuance du drame qui se noue à l'écran. Un élément particulièrement marquant est l'utilisation de chœurs d'enfants, dont l'innocence apparente vient amplifier le malaise. Il est indéniable que cette orchestration vocale puise une inspiration très nette dans la partition de Lalo Schifrin pour "The Amityville Horror" (1979). Si certains y voient une filiation proche de la citation, la technique est employée avec une redoutable efficacité, s'intégrant parfaitement à l'univers du film de Mary Lambert et servant à merveille la restitution de l'ambiance angoissante du roman.

La bande originale de "Simetierre" est une œuvre fondatrice pour Elliot Goldenthal. À la fois chaotique, expérimentale, mais aussi profondément mélodique et harmonique, elle démontre une maîtrise remarquable dans l'art de mêler les émotions contraires. Sophistiquée et chargée, cette musique préfigure les partitions cultes que le compositeur signera plus tard pour des films comme "Alien 3" ou "Entretien avec un vampire". Elle reste, aux côtés de la célèbre chanson des Ramones, un pilier de l'identité du film et une date importante dans l'histoire de la musique de film d'horreur.

 

par Benoit Basirico


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