LA MARCHE DE L’EMPEREUR, les sonorités électroniques pour évoquer l’urgence du réveil écologique

marche_empereur, - LA MARCHE DE L’EMPEREUR, les sonorités électroniques pour évoquer l’urgence du réveil écologique


par Thibault Vicq

- Publié le 10-06-2020




C’est deux ans après son premier album que l’auteure-compositrice-interprète Émilie Simon se voit entrer dans l’univers de la bande originale avec LA MARCHE DE L’EMPEREUR. Avec ce travail singulier plein de fantaisie et de mélancolie, elle reçoit une Victoire de la musique et récolte une nomination aux César en 2006. Le documentaire de Luc Jacquet lui donne l’inspiration d’une musique électro-pop mixant des sons similaires à ceux du film. 

La diversité des instruments et la voix diaphane de la chanteuse font plonger l’objectivité des images dans une atmosphère de conte. Émilie Simon parvient en outre à émouvoir en humanisant le destin animalier par des émotions qui se greffent aux situations du film, au-delà des voix off. On peut y lire la beauté du cycle de la nature, comme un paradis bientôt perdu par la menace du réchauffement climatique.

La vie des manchots obéit à un certain nombre de pèlerinages indispensables que la compositrice concrétise par le rythme. Les gouttes qui tombent, le craquement de la banquise, le bruit des pattes et l’éclosion des œufs se métamorphosent en un moteur musical sur lequel se superposent des motifs harmoniques. Le mouvement se mêle à l’effort sous le blizzard, et la dimension physique se ressent particulièrement face aux menaces du léopard de mer et du pétrel géant. Le suspense instauré montre l’importance capitale de rester en vie, les situations mises en scène provenant d’une réalité. Des sonorités industrielles rappellent non seulement la détermination de l’espèce, mais aussi, dans un aspect plus grésillant, voire doux-amer, l’urgence du réveil écologique.

L’émotion sait se faire une place dans un chemin pourtant tout tracé. Par exemple, la sensualité du chant accompagne la danse nuptiale des amants, et des cordes funèbres baignent l’espace à la mort des nouveau-nés. Du lien entre les parents et l’œuf qu’ils couvent tour à tour se dégage une pop scintillante pointilleusement produite, entourée d’une bulle de fraîcheur. L’électro-acoustique, avec ses caractéristiques rassurantes et hybrides à la fois, garde la proximité entre les images et le spectateur. Le célesta et le thérémine (ou ce qui s’en rapproche) emplissent la nuit, pendant que le burlesque des cuivres décrit les jeux, et le violoncelle flouté annonce la douleur. Tout concourt à montrer que l’espèce humaine n’est pas si différente des manchots en Antarctique, aussi soumis à l’incertitude des lendemains.

par Thibault Vicq


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