par Quentin Billard
- Publié le 01-01-2008On retrouve donc le magnifique et poignant thème de Sidney (toujours entonné par la voix fragile de la soliste Rose Thompson), le motif macabre du tueur et toutes les musiques d'horreur/suspense aux cuivres vrombissants qui ont fait toute la réputation de Marco Beltrami. Evidemment, le compositeur n'évite pas la redondance et les répétitions avec ses précédents travaux, mais le résultat reste à la hauteur des deux autres scores. 'Here We Go Again' annonce d'emblée la couleur avec l'orchestre mixé à des rythmiques électroniques modernes hérités des deux autres 'Scream'.
La terreur est au rendez-vous dès le début du film pour 'Cotton Gets Picked', accompagnant le prologue du film (assez médiocre par rapport aux prologues des deux autres films). On y retrouve toutes les recettes orchestrales des deux autres 'Scream', avec sont lot de cordes dissonantes et stridentes, de clusters de cuivres massifs, de percussions agressives et d'effets électroniques assombrissant considérablement le climat. On notera ici le côté rythmique du morceau qui accentue l'urgence de la situation lorsque Cotton reçoit un coup de fil du tueur qui l'avertir qu'il se trouve chez lui. On est loin ici du superbe et inoubliable prologue de 10 minutes de 'Scream', mais qu'importe, Beltrami installe l'ambiance de la terreur et la développera tout au long du film. 'Dopplegailer', 'Ghost Attacks' et 'The Fall Girl' (qui concerne les attaques finales du tueur) sont autant de terrifiants déchaînements orchestraux qui témoignent chacun à leur tour du savoir-faire évident de Marco Beltrami avec une intensité orchestrale toujours aussi percutante à l'écran, et ce même si l'on pourra une fois de plus reprocher la surabondance de musique dans le film et son côté extrêmement répétitif.
La nouveauté provient ici de l'utilisation plus accentuée d'un choeur. Ces voix mystérieuses résonnent de manière plus sinistre dans 'Mother's Watching' qui installe une atmosphère de peur psychologique macabre lorsque Sidney voit sa mère dans un cauchemar à moitié halluciné. Beltrami joue sur les dissonances stridentes des cordes, les glissendi, les sursauts et, bien entendu, l'utilisation du choeur qui résonne comme si les voix surgissaient d'outre-tombe, une excellente manière de suggérer les démons qui continuent de hanter Sidney. Moins psychologiques, les voix sont utilisées d'une manière plus mystérieuse dans l'excellent 'Ghost Attack' pour une séquence d'attaque du tueur dans le manoir de Milton vers la fin du film. Le morceau s'impose par sa puissance orchestrale (à noter l'importance accordée au pupitre des cuivres) et ses incessants sursauts orchestraux qui créent l'ambiance de terreur adéquate dans la scène et renforce la sensation que le tueur est omniprésent à l'instar d'un fantôme (d'où l'analogie du tueur masqué associé à un fantôme). C'est donc ici l'utilisation du choeur féminin qui attire notre attention, comme pour évoquer la détresse de Sidney, poursuivie par le tueur fou, les voix renforçant au passage le côté quasiment surhumain du tueur. A vrai dire, c'est la seule véritable nouveauté musicale dans 'Scream 3', le reste n'étant qu'un condensé répétitif des précédents travaux du compositeur. On pourra apprécier une magnifique reprise du thème de Sidney dans 'Home Sweet Home' lors de la première apparition de Sidney dans le film, un thème qui personnifie toujours à merveille la mélancolie, la fragilité et les tourments du personnage. On pourra aussi relever une très sombre reprise vocale du thème de Sidney au début de 'Piéd a Terror', la soliste étant rejointe ici par une voix d'homme plus inquiétante (on pourrait ainsi penser que Beltrami a voulu évoquer la confrontation entre Sidney et le tueur?). Reste, qu'une fois encore, l'impact de la musique dans le film est excellent et renforce à merveille l'atmosphère de terreur et de suspense sinistre voulu par Wes Craven et son équipe.
Seuls quelques morceaux se distinguent du reste du score comme 'On The Set' avec ses rythmiques électroniques tendance pop moderne, 'At The Station' avec son ambiance mélancolique de piano/cordes lorsque l'inspecteur Kincaid est en compagnie de Sidney au poste de police, sans oublier le final apaisé de 'Sid Wears a Dress', qui nous propose un véritable soulagement musical où la musique met fin à toute ambiance de peur et se veut au contraire plus mélodique, plus chaleureuse, plus rassurante, donnant l'occasion à Beltrami de faire ses adieux à son magnifique thème principal lors d'une ultime reprise triomphante et majeure du thème de Sidney (agrémenté du choeur), qui évoque très clairement l'idée que l'héroïne a vécu ses propres démons (on se serait quand même attendu à une fin un peu plus subtile et moins nunuche).
La conclusion s'impose donc d'elle-même, si vous avez adoré les deux premiers travaux de Marco Beltrami sur 'Scream' et 'Scream 2', 'Scream 3' devrait vous combler une dernière fois même si le score s'avère être finalement sans surprise et extrêmement répétitif durant ses quelques deux heures de musique dans le film (l'album n'incluant qu'à peine 32 minutes de musique, ce qui s'avère être l'essentiel malgré quelques omissions majeures). Le problème des suites est et sera toujours le même: comment faire en sorte que le compositeur puisse apporter du neuf tout en prolongeant la continuité thématique/stylistique des oeuvres précédentes en évitant le piège de la répétition redondante? Hélas, comme dans 'Scream 2', Beltrami n'évite pas ce piège et tombe au contraire en plein dedans. Du coup, malgré ses bons points (excellente reprise du thème de Sidney, utilisation d'un choeur, morceaux de terreur percutants et bien flippants, etc.), difficile de considérer 'Scream 3' comme le meilleur score de la trilogie, mais pour une partition censée conclure cette saga horrifique, cela reste un bien bel effort de la part d'un Marco Beltrami qui se sera décidément fait largement connaître auprès du public béophile grâce à ses trois grandes partitions orchestrales pour la trilogie de Wes Craven. Du coup, on attend avec une certaine impatience sa prochaine collaboration avec le réalisateur sur 'Cursed', prévu courant 2005.
par Quentin Billard
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