Par Benoit Basirico
- Publié le 24-05-2025Cette sélection des musiques entendues dans les films vus des différentes sections du festival présente quelques coups de cœur (à la fois musicaux et cinématographiques).
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Mastermind (Kelly Reichardt ) ★★★★★ - BO : Rob Mazurek
[En compétition]
Rob Mazurek signe la musique du film de casse américain de Kelly Reichardt, qui relate l'histoire d'un père de famille (J.B. Mooney) en quête d'un nouveau souffle décidant de se reconvertir dans le trafic d'œuvres d'art, dans l'Amérique des années 1970. Avec deux complices, il s'introduit dans un musée et dérobe des tableaux, mais la réalité le rattrape lorsque écouler les œuvres s'avère compliqué et que, traqué, il entame alors une cavale sans retour. La partition jazz, à la fois percussive et cuivrée, évoque magistralement l'ère des années 1970, notamment le cinéma de John Cassavetes, aux textures improvisées tout en soutenant l'arc narratif, devenant plus sombre à mesure que les perspectives du protagoniste s'amenuisent, et instillant par des riffs nerveux et son groove une rythme et une atmosphère captivante contrastant avec l'indolence du montage et le comportement erratique du protagoniste. On y entend par ailleurs une sélection éclectique de morceaux allant du R&B et de la soul des années 60 et 70 avec des artistes comme Jimmy Radcliffe et The 5th Dimension, à des sonorités plus contemporaines avec le Chicago Underground Trio (dont Mazurek et Chad Taylor font partie) et Chad Taylor (batteur).
Romería (Carla Simón ) ★★★★★ - BO : Ernest Pipó
[En compétition]
Le guitariste Ernest Pipó retrouve la réalisatrice Carla Simón après leur collaboration sur "Eté 93" (2017) pour ce drame espagnol qui suit Marina (Llúcia Garcia), adoptée, qui, en cherchant un document d'état civil pour ses études supérieures, doit renouer avec sa famille paternelle. Guidée par le journal intime de sa mère, elle se rend sur la côte atlantique, rencontre cette famille inconnue, faisant ressurgir le passé et découvrant les secrets, les non-dits et les hontes qui l'entourent. La partition, mêlant guitares, quatuor à cordes avec violoncelle proéminent, dans une dimension tellurique, boîte à musique et des touches de flamenco, explore la mémoire, les secrets familiaux et l'Espagne des années 80, complétée par une chanson originale "Mar D'Aquí" interprétée par Maria Arnal et une sélection éclectique de chants traditionnels, pop/rock espagnol jouée lors d'une fête par le groupe Pelepau, et une sonate de Beethoven.
Valeur sentimentale (Joachim Trier ) ★★★★ - BO : Hania Rani
[En compétition]
La pianiste, compositrice et chanteuse polonaise Hania Rani (entendue dans "Rosalie", 2024) signe la musique du drame norvégien de Joachim Trier. Ce dernier faisait auparavant appel à Ola Fløttum pour ses films, notamment "Oslo, 31 août" (2011), "Thelma" (2017) et "Julie en 12 chapitres" (2021). Pour cette première collaboration avec le réalisateur, Hania Rani propose une partition mélancolique, épurée et émotionnellement puissante, utilisant des cordes (violon, alto, violoncelle), des vents (clarinette, flûtes), du piano et des synthétiseurs. Sa musique, souvent introspective, avec en son coeur le piano intimiste, vise à donner vie à la tristesse et à la vulnérabilité du personnage de la comédienne Nora (Renate Reinsve) qui voit avec sa soeur leur père Gustav, un réalisateur de renom, réapparaître après de longues années d’absence suite au décès de leur mère. Celui-ci lui propose un rôle dans son prochain film, mais elle refuse avec défiance, ravivant des souvenirs de famille douloureux. On y entend par ailleurs une variété de styles musicaux allant du classique au rock en passant par l'électro, avec des artistes notables tels que Roxy Music, New Order, Artie Shaw et des compositeurs classiques comme Berlioz et Debussy.
20 - VIE PRIVÉE (Rebecca Zlotowski) - BO : ROB (Robin Coudert)
22 - Résurrection (Bi Gan) - BO : M83
22 - Sorry, Baby (Eva Victor) - BO : Lia Ouyang Rusli (OHYUNG)
La Couleuvre noire (Aurélien Vernhes-Lermusiaux ) ★★★ - BO : Tindersticks (Dan McKinna, Stuart Staples)
[ACID]
Tindersticks (le bassiste Dan McKinna et le chanteur Stuart Staples, connus au cinéma pour les films de Claire Denis) signe la musique du drame de Aurélien Vernhes-Lermusiaux, un récit centré sur Ciro qui revient chez lui après des années d’absence au chevet de sa mère dans le désert colombien et affronte des serpents, comme incarnation magique et maternelle. La partition navigue entre l'intime du deuil et le grandiose du paysage, en adoptant une approche épurée et atmosphérique, usant de boucles (orgue Hammond, harmonium, piano solo), de percussions discrètes, et d'une guitare parcimonieuse, prolongeant un envoutement, à travers des motifs hypnotiques, une ondulation, qui évoquent le symbolisme du serpent et l'onirisme du lieu.
Fuori (Mario Martone ) ★★ - BO : Valerio Vigliar
[En compétition]
Valerio Vigliar signe la musique du biopic italien de Mario Martone centré sur la comédienne et écrivaine italienne Goliarda Sapienza (interprétée par Valeria Golino), alors qu'elle travaille à Rome en 1980 sur son chef-d'œuvre, "L'Art de la joie". Face au rejet de son manuscrit, elle commet un vol qui la mène en prison, où elle y rencontre diverses femmes (interprétées par Matilda De Angelis et Elodie), dont l'une va la reconnecter au désir de vivre et d'écrire. La musique fusionne des éléments électroniques (synthétiseur, échantillons), minimalistes (piano) et jazz (clarinette basse, la basse et la batterie), créant une ambiance climatique et solaire, intime et nostalgique, évoquant un passé luxuruant (celui de l'autrice à succès). On y entend aussi une sélection de morceaux de répertoire, notamment du jazz des années 40 et 50 avec Duke Ellington et John Coltrane, des compositions plus récentes de l'artiste avant-gardiste Robert Wyatt, ainsi que des titres italiens des années 50 et contemporains.
The History of Sound (Oliver Hermanus ) ★ - BO : Oliver Coates
[En compétition]
Oliver Coates ("Aftersun") signe la musique du drame romantique historique américain d'Oliver Hermanus qui relate l'histoire de deux hommes, Lionel (Paul Mescal) et David (Josh O'Connor), dans l'Amérique de l'après-Première Guerre mondiale, entre 1919 et le début des années 1920. Ils entreprennent un voyage pour enregistrer des chansons folkloriques, sillonnant les forêts et les îles du Maine afin de collecter et préserver les chants menacés d’oubli. La partition de Coates propose parfois des notes tenues et textures en souterrain dans un certain immobilisme, ou alors de grandes envolées de cordes. On y entend aussi un mélange éclectique de musique classique (allant de Pergolèse à Fauré), de nombreuses chansons folk traditionnelles au coeur du sujet (interprétées notamment par Sam Amidon et Sheila Kay Adams), et aussi Joy Division ("Atmosphere").
21 - Planètes (Momoko Seto) - BO : Quentin Sirjacq, Nicolas Becker
22 - Mother and Child / Zan O Bacheh (Saeed Roustaee) - BO : Ramin Kousha
Par Benoit Basirico
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