Réalisé par William Wyler
Avec Charlton Heston, Stephen Boyd, Jack Hawkins
Long-métrage américain
Genre : Péplum, Drame, Aventure
Durée : 3h32min
Année de production : 1959
Distributeur : Metro Goldwyn Mayer (MGM)
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B.O en écoute intégrale
Légendaire compositeur de l'âge d'or hollywoodien, Miklos Rozsa a accompli un travail colossal sur « Ben-Hur ». Plus qu'une simple partition musicale pour un péplum, Rozsa a dû mener un véritable travail d'historien de la musique pour tenter de se rapprocher le plus possible du contexte musical de l'époque à laquelle se déroule le film. Utilisant bien évidemment toutes les ressources d'un grand orchestre symphonique, Miklos Rozsa a construit une partition colossale autour d'une poignée de grands thèmes nombreux véhiculés à travers tout le film. C'est sans doute la musique la plus emblématique du "Golden Age" hollywoodien.
[© Texte : Cinezik] • 0884977446050
♡ Notre Coup de Coeur B.O
♡ Dans le genre "Film historique"
♡ Prix pour cette B.O : Oscar •
Les nombreuses séquences spectaculaires ne
manquent pas dans cette musique : la naissance de Jésus, la parade des
chars avant la course, les marches romaines, la bataille des galères, la
victoire de Ben-Hur à la course des chars (on sent d'ailleurs ici les
influences de la musique de Rozsa sur l'esthétique des futurs « Star Wars » de
John Williams), la sinistre séquence funèbre du chemin de croix de Jésus
sans oublier le magnifique final du film avec le miracle de la pluie
qui purifie les visages de Miriam et Tirzah après la mort du Christ sur
la croix : que de moments inoubliables qui, musicalement, sont portés
par chaque note du compositeur avec une certaine grâce et un lyrisme
classique constant.
L'ouverture de « Ben-Hur » reste tout bonnement imposante. Elle nous
plonge d'emblée dans l'ambiance épique du film de William Wyler. Miklos
Rozsa utilise une technique musicale qui deviendra systématiquement
associé aux Romains dans le film, c'est-à-dire l'utilisation de quintes
parallèles, un intervalle aux consonances médiévales/archaïques que
l'harmonie classique moderne interdit ensuite dans ses traités. Ainsi,
toutes les nombreuses fanfares qu'a écrit Rozsa pour les marches
romaines sont basées autour de ce principe de quinte à vide en
parallèle, qui résonnent avec une certaine dureté et une rigidité
évoquant non seulement l'aspect historique de l'époque mais aussi la
suprématie de l'empire romain. Ces marches pompeuses apportent un côté
cérémonial, martial et spectaculaire à la partition de Rozsa. Elles
demeurent très imposantes, en particulier grâce à un pupitre de cuivres
très utilisé pour le caractère guerrier/militaire des fanfares (qui
évoquent à maintes reprises Richard Wagner !). L'ouverture annonce alors
d'emblée le thème de Ben-Hur après une fanfare très cuivrée nous
plongeant directement dans l'ambiance du film. Le thème décrit en
réalité la soif de vengeance de Ben-Hur, justifiant alors son côté dur
et déterminé. Puis, pour l'inévitable séquence de l'épilogue, on assiste
à la naissance du Christ. Miklos Rozsa annonce alors ici le deuxième
grand thème de sa partition, le thème des rois mages, mélodie
majestueuse aux accents populaires interprété magnifiquement ici par les
cordes dans toute leur splendeur, et associé dans le film au miracle
que représente la naissance de Jésus Christ sur terre.
« Ben-Hur » s'impose tout au long de l'écoute par la richesse et la
variété de ses différentes émotions. Emerveillement avec la naissance du
Christ et les rois mages, tristesse avec les moments dramatiques où
Miriam et Tirzah sont devenus lépreuses et doivent se cacher dans la
vallée des lépreux, séquence qui suggère toute l'amertume et la haine au
coeur de Ben-Hur, mais aussi passages plus romantiques entre Ben-Hur et
Esther - des passages qui restent toujours très stéréotypés et
conventionnels, mais en tout cas parfaitement écrit dans un style
postromantique 19èmiste du plus bel effet ! Reste que la partie
guerrière est toujours aussi imposante : le défilé des chars s'avère
être très prenant, avec cette longue marche cuivrée, sans oublier
l'excitante bataille des galères - autre passage incontournable de la
partition de « Ben-Hur » ! A ce propos, Rozsa introduit d'ailleurs cette
séquence au son d'un rythme martial enlevé qui rappelle beaucoup le
fameux « Mars » des « Planètes » de Gustav Holst (référence musicale
incontournable au cinéma américain !). Cette excellente séquence
musicale est suivie des coups de marteaux censés apporter le rythme aux
rameurs de la galère afin de faire avancer le bateau. La musique de
Rozsa suit alors astucieusement dans ce passage le rythme des marteaux,
n'hésitant pas à devenir de plus en plus tendue voire stressante alors
que les rythmes de marteaux s'accélèrent pour la vitesse d'attaque.
Reste que la bataille des galères est un moment d'action incroyablement
excitant, d'une puissance redoutable - autant à l'écran que sur l'album -
un grand moment de musique en somme !
Miklos Rozsa utilise d'autres thèmes tout au long de sa partition. On
retrouve ainsi l'inévitable « Love Theme » lyrique et sirupeux, celui de
la vengeance de Ben-Hur mais aussi un thème aux consonances juives pour
illustrer le retour de Ben-Hur à Jérusalem, lorsqu'il revient chez lui
en Judée. La thématique de la partition de « Ben-Hur » demeure solide,
riche et inspirée, magnifiquement construite, équilibrée et bien amenée.
On retrouve à travers tout ces thèmes les principales idées du film :
la vengeance, la passion, la lutte, la ferveur, et ce même si le point
le plus important de l'oeuvre de Rozsa reste sans aucun doute
l'incroyable reconstitution historique que le musicien a fait à partir
d'une écriture symphonique très stylée (et aussi très stéréotypée !) qui
impose une vision musicale colossale et titanesque de l'empire Romain à
l'époque de Ben-Hur, une vision musicale qui ne pouvait naître qu'à
travers les pages de l'un des plus grands maîtres du Golden Age
hollywoodien. La dernière partie du film, celle concernant les deux
lépreuses (la mère et la soeur de Ben-Hur) s'avère être radicalement
plus sombre. Miklos Rozsa fait alors appel à des cordes amples et denses
afin de retranscrire de manière très sombre la souffrance de Ben-Hur et
celle de Miriam et Tirzah. La musique commence à résonner de façon
particulièrement sombre et dramatique après le passage où le geôlier
trouve Miriam et Tirzah au fond de leur cellule, devenues lépreuses. La
musique devient alors quasiment terrifiante. La musique de la séquence
dans la vallée des lépreux reste désespérée, sombre, dramatique. Rozsa
utilise le pupitre des cordes agrémentées de couleurs tragiques et
sombres que le compositeur obtient par exemple en utilisant un jeu
d'harmoniques sur les cordes du plus bel effet.
Mais la véritable surprise de la partition de « Ben-Hur » reste sans
aucun doute la superbe finale du film. Alors que le Christ meurt sur sa
croix après avoir été crucifié, un terrible orage se déclenche. La pluie
tombe et coule sur Miriam et Tirzah qui, miraculeusement, sont guéries
de la lèpre. Cette séquence est évidemment symbolique : elle représente
le pouvoir de la foi en Dieu. Le miracle de la guérison est une sorte de
cadeau du ciel pour récompenser cette foi poignante, la pluie
ruisselant sur le sol étant ici aussi un élément symbolique, image de
l'eau qui purifie, qui lave les souillures, qui nettoie l'homme de ses
pêchés. Et pour illustrer ce miracle, Miklos Rozsa utilise alors un
choeur grandiose au milieu de l'orchestre afin de conférer à cette scène
un caractère religieux indissociable de cette grande conclusion, une
coda grandiose, véritable hymne aux miracles divins - à noter qu'il
était de coutume à cette époque de conclure la plupart des péplums
bibliques sur des choeurs religieux !
« Ben-Hur : A Tale of the Christ » reste au final une partition immense
et démesurée, aux orchestrations magnifiques, servie par ses cuivres
imposants et ses cordes lyriques typiques de Miklos Rozsa, illustrant la
puissance de l'empire romain et de ses puissantes légions de
centurions. Le compositeur nous offre sur le film de William Wyler une
excellente reconstitution musicale de l'histoire à travers un style
symphonique emprunté au répertoire postromantique allemand du 19ème
siècle (Wagner, Strauss, Mahler), une approche conventionnelle et
stéréotypée pour l'époque qui peut paraître aujourd'hui un peu datée,
mais qui s'adaptait pourtant à merveille à la richesse visuelle et à la
virtuosité technique de la superproduction de William Wyler. Quoiqu'il
en soit, « Ben-Hur : A Tale of the Christ » restera à jamais une oeuvre
majeure dans le monde de la musique de film, un chef-d'oeuvre épique et
classique de l'âge d'or hollywoodien où tous les moyens étaient bons
pour imposer à l'écran une écriture symphonique resplendissante et
flamboyante, chose devenue beaucoup plus rare de nos jours. Un
chef-d'oeuvre incontournable de la musique de film, tout simplement !
Miklos Rozsa a également écrit la musique de : Providence (1977) • Le Cid (1961) • La Vie privée de Sherlock Holmes (1970) • Sodom And Gomorrah (1962) • Le Sérum de longue vie (1945) • Fedora (1978) • La maison rouge (1947) • Le voleur de Bagdad (1940) • La Maison du Docteur Edwardes (1945) • Ivanhoe (1952) •
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