Musique composée par :
John Williams
Avec Harrison Ford, Kate Capshaw, Jonathan Ke Quan
Film américain
Genre: aventure
Durée: 1H58
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Le score central des aventures d'Indiana Jones, et par la même occasion l'apogée du style de Williams : un score extrêmement abouti, complexe et efficace, sombre et rythmé, mais surtout d'une grande virtuosité.
[© Texte : Cinezik]Tracklist (de la BO en CD ou Digital)
1-Anything Goes 2.49+
2-Indy Negotiates 3.58*
3-The Nightclub Brawl 2.30*
4-Fast Streets of Shanghai 3.39
5-Map/Out of Fuel 3.21*
6-Slalom on Mt. Humol 2.23
7-Short Round's Theme 2.28
8-The Scroll/To Pankot Palace 4.24*
9-Nocturnal Activities 5.53
10-Bug Tunnel/Death Trap 3.28
11-Approaching The Stones 2.38*
12-Children in Chains 2.41
13-The Temple of Doom 2.58
14-Short Round Escapes 2.20*
15-Saving Willie 3.34*
16-Slave Children's Crusade 3.22
17-Short Round Helps 4.49*
18-The Mine Car Chase 3.40
19-Water! 1.55*
20-The Sword Trick 1.03*
21-The Broken Bridge/
British Relief 4.46*
22-End Credits 6.19
Bonus Tracks on CD 5:
23-Indy and the Villagers 3.51*
24-The Secret Passage 3.28*
25-Return to the Village/
Raiders March 3.26*
*Previously unreleased.
+Ecrit par Cole Porter
Interprété par Kate Capshaw
Spielberg, Ford, Williams : trio de choc pour trilogie culte
[par Sylvain Rivaud]
A l'occasion de la sortie en salles d'Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, impossible de passer outre une petit rétrospective musicale des films précédents, tous évidemments mis en musique par John Williams et réalisés par Steven Spielberg. Ces trois films sont un peu à part dans leur filmographie, car lorgnant constamment sur le registre de l'aventure pure et dure, du divertissement, voire même vers le film de genre (les autres oeuvres de Spielberg se voulant plus engagées ou nostalgiques).
John Williams retrouve donc encore une fois l'univers d'Indiana Jones
qu'il avait déjà si fièrement abordé dans « Raiders of the Lost Ark » en
1981. Pour « Indiana Jones and the Temple of Doom », le maestro a crée
une nouvelle partition symphonique complexe et démesurée, une oeuvre
d'une très grande richesse qui, loin de paraphraser la musique du
premier opus, nous offre de nouveaux thèmes et de nouvelles ambiances à
couper le souffle. Et comme le film lui-même, la musique de « The Temple
of Doom » s'avère être nettement plus sombre que celle du premier
épisode, et aussi nettement plus agitée et massive, car cette partition
possède beaucoup plus de morceaux d'action que « Raiders of the Lost Ark
» lui-même. Comme pour le score du premier opus, la partition de « The
Temple of Doom » s'avère être d'une très grande richesse dans les thèmes
musicaux qu'elle propose. Ainsi, en plus de la traditionnelle « Raiders
March » indissociable de la saga des Indiana Jones, on pourra apprécier
ici une pléiade de nouveaux thèmes, avec pour commencer un nouveau Love
Theme pour la romance entre Indy et Willie dans le film (« Nocturnal
Activities »), un thème plus léger et espiègle pour Demi-Lune (« Short
Round's Theme »), le nouveau complice d'Indy, et un thème indien
s'apparentant à une marche sombre et guerrière pour le temple maudit des
Thugs (« Slave Children's Crusade »). A noter que la « Raiders March »
s'avère être moins présente dans ce second opus, Williams ayant préféré
mettre l'accent ici sur l'atmosphère sombre et macabre du film.
Après la chanson de Cole Porter « Anything Goes » (arrangée par John
Williams) pour le numéro de cabaret de Willie au début du film, « Indy
Negotiates » et « The Nightclub Brawal » nous permettent de retrouver le
John Williams des grandes musiques d'action, et ce dès le début du film
: la tonalité est donnée, « Indiana Jones and the Temple of Doom » sera
définitivement la musique de l'action pure et dure ! On retrouve ici
les orchestrations complexes chères au maestro, qu'il s'agisse des
cuivres en sourdine ou des doublures instrumentales savamment élaborées
qui permettent au compositeur de renforcer la tension de l'affrontement
avec le gangster chinois au début du film. « The Nightclub Brawl »
(scène de la fusillade) s'avère donc être le premier déchaînement
orchestral de la partition de Williams, un morceau cuivré, complexe,
virtuose et survolté typique du maestro. A noter que le compositeur a
choisit de ne pas mettre en avant le thème d'Indy ou d'autres thèmes
secondaires pour laisser l'orchestre développer un dialogue musical plus
contrapuntique et essentiellement articulé sur le rythme. A noter
cependant l'extrême cohérence du morceau qui, bien que dénué du moindre
apport thématique, reste cohérent de bout en bout dans la façon dont
Williams utilise des mini-motifs rythmiques qui se baladent d'un
instrument à un autre. L'affrontement débouche sur la poursuite dans les
rues de Shanghai avec « Fast Streets of Shanghai ». Cette fois,
Williams dévoile enfin ses thèmes avec la mélodie ascendante espiègle et
légère pour Demi-Lune - et ses sonorités asiatiques rafraîchissantes -
et les premiers rappels de la marche héroïque d'Indy. Le morceau reste
dans la continuité de « The Nightclub Brawl » et amplifie ici le jeu des
rythmes et des orchestrations pour illustrer la course folle d'Indy,
Demi-Lune et Willie dans les rues de Shanghai, avec les gangsters de Lao
Che. On appréciera d'ailleurs la superbe reprise héroïque du « Raiders
March » à la fin du morceau, lorsqu'Indy et ses deux complices
embarquent finalement à bord de l'avion et s'enfuient précipitamment de
la Chine.
Après cette première partie plutôt agitée, Williams nous fait clairement
comprendre que les héros ne sont pas encore sortis d'affaire avec «
Map/Out of Fuel » pour la scène du crash de l'avion. Si le thème d'Indy
est repris ici dans toute sa splendeur - accompagné ici de la toute
première apparition du Love Theme de Willie - c'est pour mieux préparer
l'auditeur à ce qui va suivre : un nouveau déchaînement orchestral en
règle, aboutissant à l'excitant « Slalom on Mt. Humol » pour la descente
en bateau de sauvetage le long de la montagne, un superbe scherzo
frénétique avec ses ponctuations de cuivres et ses traits de
cordes/vents virtuoses. A noter que Williams développe ici un motif de
cuivres/cordes qui s'inspire astucieusement des premières notes du thème
romantique, transformé ici en motif plus sombre. A ce sujet, le morceau
se conclut d'ailleurs de façon plus sombre lorsqu'Indy et les autres
découvrent qu'ils ont atterris en Inde, dans des territoires sauvages. «
Short Round's Theme » s'avère être quand à lui un morceau de transition
important car, contrairement à ce que le titre du morceau laisse
présager, on ne retrouvera pas que le thème de Demi-Lune ici mais aussi
la toute première apparition du thème indien mystérieux suggéré
brièvement aux cordes. Le compositeur en profite aussi pour utiliser
quelques touches orientales discrètes évoquent les décors de l'Inde (et
plus particulièrement l'utilisation du traditionnel sitar). Ces
sonorités orientales se retrouvent d'ailleurs dans « Indy and the
Villagers » pour l'arrivée dans le village indien (morceau qui, dans le
coffret intégral de Concord Records, se trouve sur le 5ème CD). Williams
développe ici les sonorités indiennes à l'aide du sitar et
d'orchestrations plus sombres et inquiétantes, un travail d'ambiance
assez saisissant ponctué par l'arrivée inattendue de choeurs ténébreux
pour la scène où les héros se retrouvent face à la statue de Kali. Le
maestro en profite aussi pour développer le mystérieux thème indien qui
sera véritablement au coeur de cette nouvelle partition - un thème
extrêmement mémorable et assez célèbre dans la saga d'Indiana Jones,
comme toujours chez John Williams !
A noter les percussions ethniques/orientales de « The Scroll/To Pankot
Palace » qui accompagnent le trajet d'Indy et ses amis en direction du
palais de Pankot, des touches ethniques qui restent toujours très
discrètes dans la musique mais qui permettent de renforcer assez
agréablement la partie plus orientale de la musique de Williams. A noter
que « To Pankot Palace » développe un motif secondaire que l'on
retrouvera notamment dans « The Mine Car Chase » et « The Broken Bridge
», souvent confié aux cors et qui deviendra un motif d'action par la
suite. Si les choses semblent se calmer quelque peu avec la reprise
savoureuse du thème romantique dans « Nocturnal Activities », c'est pour
mieux nous replonger dans l'action avec une seconde partie beaucoup
plus sombre et agitée. Et pour rester dans un style sombre, « The Secret
Passage » (scène où Willie et Indy découvrent le passage secret
derrière le mur d'une pièce du palais) permet au maestro de replonger
dans un style plus atonal et dissonant, à l'aide de cordes brumeuses,
d'orchestrations mélangeant violons aigus et cuivres graves de façon
assez impressionnante. A noter que le morceau aboutit d'ailleurs à une
seconde partie bien plus chaotique aux effets instrumentaux
avant-gardistes (glissandi, clusters, effets aléatoires, etc.) qui
apportent une atmosphère quasiment plus horrifique au film. Dès lors,
l'action débute avec « Bug Tunnel/Death Trap » et ne nous lâchera plus
jusqu'au bout. La musique dans l'entrée du temple devient ainsi
nettement plus sombre et agressive. « Death Trap » (scène du piège qui
s'abaisse petit à petit sur Indy, Demi-Lune et Willie) s'impose
d'ailleurs par son rythme marqué qui accélère progressivement, un peu à
la manière de l'inoubliable « Desert Chase » de « Raiders of the Lost
Ark ». « Approaching the Stones » nous fait clairement basculer quand à
lui dans un univers plus cauchemardesque et ténébreux avec l'utilisation
d'un choeur maléfique accompagné d'un orchestre beaucoup plus sombre et
oppressant. Ici aussi, Williams renoue avec un style atonal et agressif
qui accompagnera la plupart des musiques à l'intérieur du temple maudit
des Thugs et de leur sorcier, Mola Ram (Amrish Puri). « Children in
Chain » développe quand à lui le thème indien associé ici aux enfants
esclaves.
Mais c'est surtout « The Temple of Doom » qui attirera ici plus
particulièrement notre attention. Véritable climax central de la
partition de John Williams, « The Temple of Doom » est un morceau à part
dans la partition de « Indiana Jones and the Temple of Doom », car il
développe un chant maléfique confié à un choeur mixte a cappella sur des
paroles étranges, un choeur aux accents démoniaques pour la fameuse
scène du sacrifice. Williams a choisit ici de ne pas utiliser
l'orchestre en ne conservant uniquement que des percussions quasi
tribales pour accompagner les choeurs sataniques qui évoquent un chant
de rituel Thug absolument terrifiant, un morceau extrêmement intense
dans la scène du sacrifice avec son accélération rythmique de plus en
plus stressante alors que la victime descend petit à petit dans le feu.
Williams verse clairement ici dans l'expérimental pur en utilisant le
choeur dans des effets vocaux aléatoires (glissandi, chuchoté, etc.). De
toute façon, une approche orchestrale n'aurait pas pu coller sur cette
scène, et le morceau en l'état actuel apporte une puissance incroyable
sur la scène en question, une véritable chorégraphie musicale de terreur
pure : un grand moment dans la partition de « Indiana Jones and the
Temple of Doom » (et aussi un morceau assez dérangeant dans son
évocation directe d'un culte satanique). L'action reprend ensuite de
plus belle avec quelques déchaînements orchestraux en règle : « Short
Round Escapes » et « Saving Willie », aboutissant à un autre morceau
incontournable de la partition de Williams : « Slave Children's Crusade
». Le maestro peut enfin développer son thème indien dans toute sa
splendeur avec une marche guerrière du plus bel effet - accompagné ici
par des coups d'enclume et des rythmes de caisse claire martiale. Le
morceau évoque alors la séquence où Indy part délivrer les enfants
esclaves des Thugs. « Slave Children's Crusade » est d'ailleurs sans
aucun doute l'un des morceaux d'action les plus connus de la partition
de « Indiana Jones and the Temple of Doom », un nouveau grand coup de
maître de la part du maestro pour un thème mémorable d'une très grande
classe, tout simplement ! Et comme si cela ne suffisait pas, l'action
s'amplifie avec « Short Round Helps » et le tour de force orchestral
complexe et virtuose que représente « The Mine Car Chase » pour la
poursuite dans les mines avec les Thugs.
« The Mine Car Chase » doit beaucoup à ses nombreux traits virtuoses des
cordes et des vents, qui jouent ici des lignes mélodiques d'une extrême
rapidité aux consonances plus orientales. « The Mine Car Chase » est de
loin l'un des morceaux d'action les plus impressionnants de la
partition de « Indiana Jones and the Temple of Doom », un morceau qui
semble avoir donné pas mal de fil à retordre de la part des musiciens du
Hollywood Studio Symphony qui, encore une fois, exécutent ce morceau
d'une main de maître. A noter que l'on retrouve ici aussi le motif
secondaire de cors de « To Pankot Palace » que Williams nous fait
entendre à quelques reprises entre deux déchaînements orchestraux d'une
virtuosité et d'une complexité rare. Il faut quand même signaler que
John Williams a rarement écrit un morceau aussi complexe et virtuose que
« The Mine Car Chase » dans toute sa carrière. L'action continue de
nouveau avec « Water ! » mais c'est « The Sword Trick » qui attirera ici
notre attention, pour l'une des rares touches d'humour du score : pour
la scène où Indy se retrouve face à des indiens armés de sabre et se
décide alors à sortir son pistolet pour les éliminer - comme dans la
scène au Caire dans « Raiders of the Lost Ark » - mais ne le trouvant
finalement plus dans son étui. Williams nous propose ici un très bref
clin d'oeil à son morceau « The Basket Chase » qu'il avait écrit pour le
premier épisode. Enfin, la confrontation finale est illustrée avec un
ultime morceau d'action d'une intensité incroyable, « The Broken
Bridge/British Relief », qui reprend les choeurs maléfiques de « The
Temple of Doom » lorsqu'Indy affronte Mola Ram sur le pont détruit, un
nouveau déchaînement orchestral particulièrement enragé aboutissant
finalement à une fanfare plus héroïque et « british » lorsque les
soldats anglais débarquent pour mettre fin à la menace des Thugs. Enfin,
« Return to the Village/Raiders March » conclut l'aventure avec le
retour triomphant de la célèbre fanfare d'Indiana Jones et le
traditionnel générique de fin qui reprend tous les grands thèmes de la
partition.
Avec « Indiana Jones and the Temple of Doom », John Williams nous offre
une nouvelle partition particulièrement sombre et d'une grande
complexité, avec des thèmes d'une grande richesse et une écriture
orchestrale qui atteint ici des sommets de virtuosité comme on en a
rarement entendu dans une musique de film de ce genre (« The Mine Car
Chase »). Une fois de plus, John Williams a parfaitement assimilé toutes
les différentes facettes du film de Steven Spielberg et nous propose
ainsi une partition d'une énergie incroyable, entre la fureur satanique
et angoissante de « The Temple of Doom » et le romantisme plus lyrique
de « Nocturnal Activities », entre la malice d'un « Short Round's Theme »
ou la frénésie martiale d'un « Slave Children's Crusade ». Véritable
tour de force orchestral du début jusqu'à la fin, « Indiana Jones and
the Temple of Doom » perd en mystère ce qu'il a gagné en intensité, John
Williams nous offrant un opus musical résolument tourné vers l'action
et les déchaînements orchestraux totalement démesurés. Un autre grand
classique incontournable dans la collaboration John Williams/Steven
Spielberg !
Radio : BO mensuelles (Emission de Février 2019 • Aligre FM)
Cinezik présente cet ouvrage :
LA MUSIQUE DE FILM, COMPOSITEURS ET RÉALISATEURS AU TRAVAIL
(Benoit Basirico, Hémisphères Editions)