Cinezik : Qui est Alain Ranval et Ramon Pipin ?
Alain Ranval : C'est la même personne. C'est moi. Ca fait un moment que je fais de la musique. Quand j'ai débuté, mon premier groupe était "Au bonheur des dames", et chaque membre s'était trouvé un pseudo, j'ai donc gardé le mien. En général, quand je suis content d'un film, je mets mon pseudo, et quand j'ai honte je mets mon vrai nom.
Quels étaient vos débuts au cinéma ?
Le premier film que j'ai fait c'était VIENS CHEZ MOI J'HABITE CHEZ UNE COPINE avec Renaud, puisque pendant cinq ans j'étais son directeur artistique, musique composée en collaboration avec Jean-Philippe Goude.
Pendant ce temps là, je continuais à jouer dans des groupes, pendant six ans je jouais avec "Odeurs".
Pour le cinéma, j'ai collaboré avec Albert Dupontel (BERNIE, LE CREATEUR, ENFERMES DEHORS), et avec Laurent Baffie (LES CLEFS DE BAGNOLES) que je connais depuis 30 ans alors qu'il n'était rien. J'ai même fait la musique de sa pièce de théâtre.
Comment composez-vous ?
Je fais tout en studio, je programme beaucoup de choses. Je n'ai pas de formation classique alors quand j'ai besoin de cordes, je fais appel à Jean-Philippe Goude pour l'orchestration. Faire de la musique de film me plaît vraiment.
Quel fut le travail sur le film COLUCHE ?
Il y a beaucoup de musiques dans le film, et le challenge était de faire coexister la musique originale, les morceaux d'époque qui ont été achetés, et les musiques de scène lors des spectacles de Coluche.
Antoine De Caunes a une grosse culture rock. Et on était parti au départ sur un esprit Led Zeppelin. Demeure dans le film les guitares acoustiques.
Ce que je cherche quand je fais un film, c'est de trouver un truc nouveau. J'apprécie Morricone pour cela. Je n'aime pas le remplissage habituel à Hollywood. Je me considère d'un style européen, même si j'adore Carter Burwell, Thomas Newman ou Jon Brion. Il faut se mettre au service de l'image tout en affirmant son style.
J'écris à partir du scénario, puis on voit si cela fonctionne à l'image en travaillant avec le monteur. Antoine m'a vraiment fait confiance là-dessus.
Même si j'ai composé essentiellement pour des comédies, mon idée est d'accompagner le côté dramatique du personnage. Il y a un thème ample, un peu sous-mixé.
Il y a aussi une séquence du film qui a été supprimée et qui se retrouvera dans les bonus du DVD. Il y avait 40 choristes en studio, 100 pistes. C'est une séquence dans laquelle Coluche fume un pétard et a des visions oniriques. Il faut attendre le DVD pour la découvrir.
Avez-vous connu personnellement Coluche ?
Oui, biensûr.
C'était un rapport musical tout d'abord puisqu'il voulait mettre notre groupe en scène et aussi pour quelques prestations comme lorsqu'il voulait faire chanter Charlotte de Turckheim. J'allais chez lui régulièrement. On se connaissait sans être proche. En revanche, le bassiste de mon groupe, Gérard Prévost, le connait davantage, il était son bassiste.
Quel mélomane était Coluche ? (Cette question est visible en vidéo en bas de page)
Il n'était absolument pas mélomane. Il aimait le "do-hop", le rock des années 50, "Les Chaussettes noires", mais il était sourd. Il avait des conceptions très particulières du mixage et de la musique. Par exemple, lorsqu'un truc lui plaisait, il fallait le mettre très fort et ôter tout le reste.
Il écoutait beaucoup de musique, mais on ne peut pas dire qu'il avait une véritable culture musicale. Y en a tellement d'autres qui n'en ont pas que ce n'est pas grave.
Et Coluche était quelqu'un de tellement populaire qu'il pouvait à peine sortir dans la rue sinon c'était l'émeute. C'est la raison pour laquelle sa vie sociale était vraiment chez lui. Tout Paris allait chez lui. C'était souvent la fête.
Dans le film, on voit Coluche chanter avec un groupe...
Oui, ce sont des chansons de Xavier Thibault qu'il chantait à l'époque comme "Je veux rester dans le noir". On a pris les arrangements originaux, et on a retravaillé cela avec l'ingénieur du son. Deux musiciens dans le film étaient vraiment sur scène à l'époque.
Quel fut le travail de mixage ?
Ce fut un travail complexe. Dans des séquences par exemple, il y a à la fois des grosses guitares et des grosses motos, ce qui est difficile à faire cohabiter.
Et la musique est elle-même multiple, symphonique et rock à la fois.