LA LEÇON DE PIANO (1993), l'instrument d'une expression intérieure

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par Benoit Basirico - Publié le 12-05-2019




B.O de Palme D'Or : LA LEÇON DE PIANO (1993) de Jane Campion.

On connaissait le compositeur anglais Michael Nyman chez Peter Greeneway pour qui il composait des musiques répétitives et entêtantes, parfois même virulentes. Pour le film romantique de Jane Campion, il s'assagit. Il propose même pour la première fois une partition sensuelle et douce. Pour le cinéaste gallois il élaborait de véritables tableaux musicaux, avec de longues plages ininterrompues à la fois immersives et hypnotiques. Pour la réalisatrice australienne (seule femme à avoir remporté avec ce film une Palme d'Or dans l'histoire du Festival de Cannes), Nyman explore une voie plus narrative et émotionnelle. D'une part, sa musique épouse le contexte historique du XIXe siècle où se situe le film (dans une veine classique rappelant Chopin), mais sans tomber pour autant dans le pastiche, par la maintenance d'une certaine modernité dans l'écriture. D'autre part, la partition épouse le point de vue de son héroïne muette, et à travers elle dépeint tout un univers musical subjectif.

Et en se mettant à la place du personnage, Michael Nyman convoque inévitablement son instrument (ce personnage mutique s'exprime à travers lui) avec des pièces épurées au piano seul. C'est avec cette sonorité qu'il nous livre le bouleversant thème (un des plus beaux que le cinéma a vu naitre) qui cristallise la romance. Dans un souci d'authenticité, c'est l'actrice Holly Hunter qui interprète elle-même les morceaux. C'est d'ailleurs pour cette raison que Nyman a écarté ses sophistications habituelles pour privilégier une facilité harmonique et rythmique. A ce propos, il suffit de voir le compositeur reprendre (et se ré-approprier) ce thème en concert (dans une version plus énervée) pour se rendre compte qu'il n'était pas entièrement satisfait du résultat. Il s'est ainsi mis véritablement au service du film et de son personnage, laissant de côté sa virtuosité. N'oublions pas également l'apport des cordes et des bois (dont un saxophone) pour parachever le romanesque musical de ce grand film et magnifier la nature néo-zélandaise.



par Benoit Basirico

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