,@,mepris,delerue, - Le Mépris (Georges Delerue), la répétition comme expression de la monotonie Le Mépris (Georges Delerue), la répétition comme expression de la monotonie

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par Quentin Billard

- Publié le 01-01-2006




La partition du 'Mépris', entièrement conçue pour l'orchestre à cordes enrichi de la subtile présence d'une harpe, dépeint avec une sensibilité poignante la tragédie amoureuse qui consume progressivement les protagonistes, pris au piège d'une monotonie sentimentale aliénante. En écho à cette désagrégation, le thème de Camille se manifeste avec une récurrence marquée tout au long du film, soulignant l'inexorable éloignement des deux êtres.

Ce choix musical s'inscrit au cœur de la démarche artistique de Jean-Luc Godard. La musique de Georges Delerue, souvent qualifiée de 'cyclique', apparaît comme le reflet sonore de ce couple en perdition. La beauté mélancolique du thème de Camille captive l'auditeur, évoquant la grandeur tragique des récits grecs antiques. Delerue semble avoir puisé une inspiration profonde dans le drame godardien, traduisant avec une grâce singulière la fêlure des sentiments à travers ses compositions. Plus qu'une simple illustration du personnage, ce thème omniprésent incarne la déchirure du lien, le destin cruel qui sépare deux âmes éprises l'une de l'autre, impuissantes face à leur désunion.

Cette mélodie lancinante résonne également comme une méditation sur la fragilité de la condition humaine, soumise aux caprices du sort. Chaque écoute révèle une nouvelle nuance, une interprétation personnelle de cette phrase musicale d'une simplicité désarmante. Les violoncelles exposent la ligne principale avec une émotion palpable, tandis que les cordes aiguës tissent un contrepoint délicat sur un motif d'accompagnement continu en arpèges. Cette régularité, cette persistance rythmique, pourrait elle aussi suggérer l'atmosphère pesante et uniforme qui enveloppe le récit. Les harmonies, d'une richesse romantique, évoquent par moments des échos de Mahler, voire une subtile influence de Jean-Sébastien Bach, dont l'Aria célèbre semble parfois se faire entendre dans le thème de Camille.

Dès les premières images, sur le titre du film, une musique intense et sombre émane de l'orchestre de Delerue, où cordes et harpe se conjuguent pour exprimer non pas tant la tragédie imminente que la profonde tristesse de la séparation. Parmi toutes les pièces composées pour 'Le Mépris', le thème de Camille s'impose avec une force irrésistible, envahissant progressivement l'espace sonore jusqu'à instiller un sentiment de lassitude. Cette répétition, loin d'être fortuite, est un choix délibéré du réalisateur, soulignant par l'usure mélodique l'épuisement des sentiments. La musique devient ainsi un acteur essentiel, participant activement à la transmission des idées du film.

Il est impossible de ne pas percevoir dans l'âme de ce thème une parenté spirituelle avec la grandeur des tragédies grecques, omniprésentes dans le film. La musique de Delerue, par sa beauté mélancolique et sa récurrence significative, transcende le simple accompagnement pour devenir un écho poignant du drame qui se déroule à l'écran, une lamentation universelle sur la fin d'un amour.

 

par Quentin Billard


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