Interview / Cannes 2021 : Charline Bourgeois-Tacquet à propos de sa collaboration avec Nicola Piovani sur LES AMOURS D'ANAÏS

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Propos recueillis à Cannes par Benoit Basirico - Publié le 22-07-2021




Pour son premier film présenté à la Semaine de la Critique, Charline Bourgeois-Tacquet fait appel au grand Nicola Piovani (compositeur pour Marco Bellocchio, Nanni Moretti, Federico Fellini, Roberto Benigni...) qui signe pour cette romance une partition au juste équilibre entre la joie et la tristesse du personnage central (Anaïs Demoustier). 

Cinezik : Ce film est dans la continuité de votre court-métrage "Pauline asservie" (2018), avec la même comédienne Anaïs Demoustier. En revanche, vous faites pour ce premier long-métrage la rencontre du compositeur Nicola Piovani (Interview dans un podcast séparé), à quel moment est-il intervenu ?

Charline Bourgeois-Tacquet : Je ne comptais pas du tout utiliser de la musique originale au départ. Ça m'intimidait un peu. Pendant tout le montage, on a utilisé des musiques additionnelles. Mais il n'y en avait pas énormément car c'est un film très dialogué. Puis à la fin du montage, je me suis rendu compte qu'il manquait une unité. J'ai alors eu envie d'essayer la musique originale. Et il se trouve que j'aime beaucoup les musiques de films des années 60 et 70, j'aime beaucoup les mélodies. Le seul compositeur vivant qui m'intéressait, c'était Nicola Piovani. Mais évidemment je n'osais pas imaginer lui proposer de faire la musique de mon film. J'en avais parlé à mon producteur qui m'avait confirmé que je visais un peu haut. Mais comme je tenais à cette idée de travailler sur des thèmes à l'ancienne, on lui a montré le film et il a accepté.

À quels films avec la musique de Piovani vous pensiez particulièrement ?

CBT : J'ai adoré récemment la musique qu'il a faite pour "Le traître" de Marco Bellocchio. Et bien sûr les films de Nanni Moretti. Je me souviens aussi particulièrement de la musique de "La Vie est belle" (Benigni) qui m'avait profondément marquée. Des films italiens en fait.

Il est réputé pour ses mélodies épurées, mais les thèmes pour votre film sont moins évidents...

CBT : Oui, c'est vrai. Il m'a proposé beaucoup de choses et je n'ai pas tout gardé. Je suis allé deux fois à Rome, on n'en a parlé ensemble. Parfois il composait un morceau très étoffé et je lui demandais de ne garder qu'un instrument.

Est-ce que pour vous il était aisé de communiquer sur la musique à votre compositeur ?

CBT : Aucune facilité. Je n'y connais absolument rien en musique. J'ai déjà eu la chance en termes de communication que Nicola Piovani parle français. Mais je crois qu'il a vite compris ce que je cherchais. Il parlait beaucoup du rythme du film et de l'évolution en terme de couleur et de tempo. Il en parlait aussi depuis son expérience d'homme qui a vécu. Ce dialogue était passionnant.

Pour vous, quel regard Nicola Piovani porte par sa musique sur cette romance et ce personnage principal qui a une dimension burlesque ?

CBT : Justement, il avait écrit pas mal de choses pour la première partie dans cette dimension burlesque. Je l'ai enlevé car je n'avais pas envie de trop le souligner. Les morceaux qu'il avait écrits pour cette première partie étaient très italien. Et je trouvais que ça n'allait pas avec le film. En revanche, sa musique apporte beaucoup dans la deuxième partie du film au moment où ça devient plus sentimental. On arrive dans le premier degré.

On est entre le tragique et la légèreté, entre les rires et les larmes, la musique trouve ce juste équilibre...

CBT : Le thème principal qui arrive deux fois dans le film, quand on l'écoute sans les images il peut être tout aussi bien douloureux ou lyrique. Je trouve dingue qu'il soit parvenu à cela, faire une musique qui puisse se métamorphoser en fonction de ce que l'on y met.

Quand Nicola Piovani est intervenu, est-ce que Ravel et Purcell qu'on entend dans le film étaient déjà placés sur le montage ?

CBT : Oui depuis toujours. Le morceau de Ravel n'est pas très connu, et Nicola m'a dit que j'avais mis dans le film le morceau le plus important de toute sa vie. Depuis qu'il a six ans, c'est son morceau fétiche. C'était quand même dingue qu'on se retrouve là-dessus.

Pensez-vous qu'il s'est inspiré de ces titres existants pour sa propre partition ?

CBT : Au départ, je n'avais pas osé lui montrer le film avec les musiques. J'ai dû lui envoyer une version sans musique. Puis ensuite je lui ai montré une deuxième fois avec ces musiques, peut-être que ça lui a donné une direction dans une second temps.

Il y a un aspect d'un autre temps dans la partition, un aspect baroque qui rappelle "La vie de château" de Rappeneau...

CBT : C'est vraiment incroyable que vous me parliez de ce film. Je ne me souviens pas du tout de la musique mais c'est un film que j'adore. Et Rappeneau compte beaucoup pour moi, notamment "Le sauvage" avec Catherine Deneuve.

Justement, j'ai pensé à Catherine Deneuve dans "Le sauvage'' en voyant Anaïs Demoustier dans son dynamisme constant. Y avait-il des musiques sur le tournage pour insuffler cette dynamique chez la comédienne ?

CBT : Absolument pas. J'ai besoin d'être absolument concentrée, dans le calme, pendant le tournage. Tout ce travail sur le mouvement, la vitesse, l'énergie, la vivacité, c'est quelque chose qu'on avait déjà exploré dans le court-métrage. Anaïs connaissait ma manière de travailler. On savait ensemble ce qu'on cherchait. C'est surtout de la mise en scène, des indications de jeu et de déplacements dans les décors.

Après cette première collaboration avec un compositeur, est-ce que cela vous donne envie de poursuivre ?

CBT : C'est possible. Cela dépendra du prochain film. J'ai trouvé cela très fructueux donc je ne l'exclut absolument pas.

Ecouter & Lire notre entretien de Nicola Piovani

 

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