Interview B.O : Christopher Young, Interview carrière (1982-2011)

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Entretiens réalisés en 2006 à Madrid par Quentin Billard et Sylvain Rivaud / en mai 2011 par Xavier Ducamp - Publié le 02-07-2011




En 20 ans de carrière, Christopher Young est devenu l'un des maîtres incontestés du frisson à Hollywood ! Son style, très adapté au cinéma de genre, a profité aussi bien au thriller, au film d'horreur qu'au fantastique et à la science-fiction, mais aussi plus tardivement au drame et à la comédie. Retour sur ses débuts, ses premiers amours de cinéma, son goût pour la musique savante, sa rencontre avec Jerry Goldsmith, ses étonnantes partitions de la fin des années 80.

 

Cinezik: Vous avez commencé votre carrière dans le cinéma en composant pour des films de genre à petit budget comme PRANKS (1982) ou THE POWER, deux films de Stephen Carpenter et Jeffrey Obrow. Comment les avez-vous rencontré ?

Christopher Young : Quand j'étais à l'UCLA (Université de Californie de Los Angeles), on m'avait expliqué que le meilleur moyen d'apprendre la musique de film était de rencontrer d'autres étudiants de cinéma. J'ai donc commencé à faire la musique de nombreux films d'étudiants, autant que je le pouvais ! La plupart des compositeurs ne le faisaient que pour avoir leur nom au générique et laisser une carte de visite. J'ai fait aussi cela un certain temps, mais progressivement j'ai essayé d'entretenir une vraie relation avec certains réalisateurs, essayer de les connaître, de passer du temps avec eux. Avant d'être engagé sur PRANKS, j'avais déjà fait une cinquantaine de films d'étudiants. Et l'un d'eux, Chris Hopkins, a justement été engagé par Stephen Carpenter et Jeffrey Obrow pour les aider sur leur film. Quand est venu le temps de faire la musique, Jeff n'ayant aucune idée sur le score, cet étudiant avec qui j'avais travaillé m'a recommandé à eux. C'est souvent comme ça que ça se passe, par relations, en rencontrant des gens. Je suis donc venu les rencontrer, parmi deux autres compositeurs également sur le coup, alors que je n'avais aucune expérience dans le domaine du long-métrage. Mais comme j'étais très motivé, je n'ai pas arrêté de leur demander tout le temps : « je veux faire cette musique, prenez-moi ! » et au bout du compte, ils ont fini par en avoir marre et m'engager ! Mais c'est surtout THE POWER, le deuxième film que j'ai fait avec eux (parce qu'on avait fait PRANKS ensemble), qui m'a ouvert des portes à Hollywood. L'équipe de production avait loué un superbe théâtre pour la première du film et avait invité beaucoup de gens (notamment le producteur Roger Corman). La plupart d'entre eux n'ont pas aimé le film... mais ont adoré la musique ! « Eh, ce type fait superbement sonner l'orchestre pour pas très cher, il nous le faut ! ». Et ils m'ont engagé pour faire des films à petit budget parce qu'ils ne pouvaient pas se payer Jerry Goldsmith ! C'est aussi un peu pour ça que mes premières musiques ressemblent à du Jerry Goldsmith, c'est ce qu'on me demandait de faire. Souvent, je m'interrogeais sur ce qu'il aurait fait sur telle ou telle scène : PLANET OF THE APES était par exemple l'une de mes influences récurrentes. Mais bien sûr, même si j'adorais sa musique j'espérais trouver ma propre voix.

Avant tout cela, quel a été votre rapport au cinéma, quel a été pour vous l'élément déclencheur qui vous a fait dire : “je veux faire de la musique de film” ?

Un jour je suis tombé par hasard sur les musiques de film fantastique de Bernard Herrmann, plus précisément les films de science-fiction de Ray Harryhausen, comme SINBAD. Vous avez le CD ? C'est un véritable chef d'oeuvre ! A l'époque je lisais beaucoup de science-fiction, donc j'allais voir les films de SF : « tiens, ces films ont aussi de la musique ? » Evidemment ! J'ai trouvé le disque et “boum !” ce fut comme une illumination ! « C'est incroyable, qu'est-ce que c'est que ça ? »... « Qui est ce type, ce Bernard Herrmann ? »... J'ai été vite obsédé par sa musique, j'ai voulu tout écouter de lui. A l'époque, ce n'était pas aussi facile de trouver les disques comme aujourd'hui, donc j'ai dû aller à New York pour dénicher les disques les plus exotiques d'Herrmann, allant même jusqu'à acheter des bootlegs ! C'est comme ça qu'a débuté ma passion de la musique de film, j'étais un vrai fan !

La deuxième chose qui m'ait amené à la musique de cinéma est LE LION ET LE VENT, qui fut le premier film que j'ai vu en salle après avoir découvert la musique de film. La musique de Jerry Goldsmith m'a ébloui et m'a définitivement convaincu : « c'est ça, c'est ce que je veux faire ! ». Finalement c'est la conjugaison, un peu par hasard, de cette découverte des musiques de SF de Bernard Herrmann et de cette projection du film LE LION ET LE VENT, qui m'ont décidé à être compositeur de musique de film.

Depuis vos débuts, vous avez composé beaucoup de musique expérimentale et atonale, avec des influences comme Penderecki, Ligeti, Reich, Stockhausen, etc. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre rapport à la musique avant-gardiste du 20ème siècle et son influence sur vos goûts musicaux ?

Si vous venez un jour dans mon bureau (vous êtes toujours le bienvenu !), vous verrez que je suis un grand collectionneur ! J'ai notamment une grande collection de masques d'épouvante et de disques de musique de film. Mais j'ai aussi une grande collection de musique d'avant-garde américaine et européenne. J'ai toujours été fasciné par leur sonorité, et leur capacité à dépasser les conventions, à manipuler les sons, à créer de nouvelles choses avec des instruments acoustiques traditionnels. Et lorsque j'ai commencé à faire de la musique de film, croyez-le ou non, mais mon ambition a toujours été d'introduire de nouveaux sons dans les films, de créer une nouvelle dimension, une nouvelle expérience dramatique à l'écran avec la musique. On peut créer des choses énormes avec les instruments, ils ont un potentiel monstrueux ! C'était vraiment ce que je voulais faire, je voulais apporter quelque chose de différent, de bizarre, et je ne pensais pas que l'électronique était forcément la solution pour ça.

Vous avez justement écrit une musique rejetée pour INVADERS FROM MARS de Tobe Hooper en 1986, remplacé par la suite par un score orchestral plus conventionnel dans laquelle on peut clairement ressentir l'influence de Jerry Goldsmith. Vous avez remanié plus tard cette partition et sorti un album chez Edel. Il s'agissait là aussi d'un score expérimental et avant-gardiste d'esprit...

Oui, cette musique était clairement trop bizarre pour le film, à l'époque. C'était une pièce de 43 minutes qui n'a pas été acceptée : ça m'a brisé le coeur. Je ne m'en suis jamais vraiment remis. Je croyais vraiment qu'on pouvait faire quelque chose avec la musique expérimentale, surtout avec un film d'horreur comme celui-ci. J'ai continué à croire à ce concept auquel je tenais fort, je voulais le concrétiser dans un film. Les musiques de films peuvent inclure une quantité innombrable de possibilités : c'est illimité, vraiment ! N'importe quel matériel peut servir pour un score. La seule chose à retenir est qu'il faut rester dramatique, c'est la seule règle. Vous pouvez utiliser le bruit d'une chasse d'eau dans votre partition : ça peut marcher. Il n'y a aucune raison pour que ça ne marche pas, du moment que ça a un potentiel dramatique dans le film! Il suffit de le manipuler pour le rendre dramatique.

Après ce coup dur, j'ai donc composé des choses plus commerciales, avec l'idée d'obtenir un ticket pour concrétiser mon souhait initial. L'avant-garde a donc toujours été en moi : je n'ai pas toujours pu l'utiliser quand je le voulais mais elle a refait surface quand j'ai pu. Et très honnêtement, les gens qui faisaient les films sur lesquels j'ai travaillé n'étaient pas très enthousiastes à l'idée que j'utilise de la musique d'avant-garde. Par exemple, sur THE GRUDGE, je ne voulais pas spécialement de cordes. Mais c'était un film d'épouvante et ils voulaient absolument des cordes, c'est la convention.

Depuis Bernard Herrmann et PSYCHO, c'est en effet difficile de se passer des cordes...

Oui, mais malgré tout, le réalisateur a adoré ce que j'ai fait...

Et vous, vous n'aimez pas votre musique pour THE GRUDGE ?

Non pas vraiment, je trouve ça trop « cliché ». Je ne voulais pas de cordes, je voulais essayer autre chose...

Dans les années 80, vous avez écrit une grande quantité de musiques d'horreur et de thriller telles que A NIGHTMARE ON ELM STREET 2 et les superbes HELLRAISER et HELLRAISER 2. Qu'appréciez-vous dans ces genres de films ?

Beaucoup de choses, bien que j'ai jamais été très fan des films en eux-mêmes. De manière générale, je n'aime pas trop les slashers, d'ailleurs. Ni même les films trop violents. J'apprécie davantage les films sombres, psychologiques, ou les histoires de maisons hantées, les histoires de fantômes. Tout ce qu'on sent mais que l'on ne voit pas. Dans les slashers, on voit tout : je ne suis pas friand de ça. Ce que j'aime dans les films, c'est quand le compositeur a l'opportunité d'évoquer ce qu'on ne voit pas avec une musique agressive et expérimentale. L'avantage des films d'épouvante est qu'on ne se soucie pas d'être « politiquement correct ». C'est le moment privilégié où on peut exprimer musicalement le mystère et l'inconnu.

On peut ressentir l'influence de Jerry Goldsmith tout au long de vos débuts comme dans le film d'action GETING EVEN ou le documentaire U-BOATS THE WOLFPACK. Avez-vous rencontré le maître et quelles sont les œuvres que vous admirez chez lui ?

Oui, j'ai eu la chance de le rencontrer deux fois. Bien sûr le compositeur que j'aurais le plus aimé rencontrer c'était Bernard Herrmann mais Jerry était le second. J'ai eu l'occasion de le rencontrer une première fois lors d'un dîner de l'ASMAC (NDLR : American Society of Music Arrangers & Composers ) à Los Angeles. Jerry devait y était honoré, et j'y suis allé. J'étais probablement le plus jeune de tous ceux qui y étaient, la plupart des autres invités étaient des arrangeurs ou compositeurs à la retraite ! Je venais juste de terminer PRANKS. On m'a présenté à Jerry, j'étais très nerveux ! Nous avons parlé des musiques composées avec peu d'argent : il m'a confié que THE OMEN, l'une de ses partitions préférées et celle pour laquelle il a eu l'unique Oscar de sa carrière, avait été faite avec très peu d'argent (le film étant lui-même une production à petit budget).

La seconde fois où je l'ai rencontré c'était après une fête (je ne me souviens plus en quel honneur)... Nous avons pris l'ascenseur ensemble, avec sa femme. Nous étions tous les trois. Bien sûr il ne se souvenais plus de moi depuis ce dîner de l'ASMAC, mais il se souvenais de mon nom : « vous savez, Chris, j'apprécie vraiment votre musique pour THE VAGRANT ». J'ai répondu : « vraiment ? » (rires). C'est tout ce qu'il m'a dit, mais j'étais aux anges. D'autant plus qu'il n'était pas dans les habitudes de Jerry Goldsmith de critiquer ou de complimenter. J'ai eu de la chance ! J'aurais vraiment aimé le connaître davantage, mais je n'ai pas pu.

Bien sûr sa musique m'a influencé, et m'influence encore. Parmi les morceaux que j'admire le plus chez lui, il y a le « Main Title » de LEVIATHAN. C'est impeccable. Chaque note compte, aucune n'a pas de raison de ne pas être là. Je crois que chaque compositeur rêve d'écrire une musique vitale, qui donne une véritable raison de vivre. Dans ses meilleures musiques, il commençait un morceau avec une idée si contraignante qu'il lui fallait absolument la développer, on ne pouvait pas l'arrêter. Du point A au point B jusqu'au point C, on se dit « Wow, développement parfait ! ». C'est à cela qu'on reconnaît les grands compositeurs, leur talent pour développer et donner vie à une matière première simple. Tout ce qu'il a fait ou presque à la fin des années 80 et début des années 90 est quasi-parfait.

Petite curiosité avant de passer à la suite : vous avez écrit tout au long des années 80 quelques musiques pour des productions argentines et philippines aujourd'hui oubliées comme WHEELS OF FIRE, WIZARDS OF THE LOST KINGDOM ou les deux opus d'heroic-fantasy BARBARIAN QUEEN. Quels souvenirs gardez vous de votre participation à ces films très en marge de vos habituelles productions hollywoodiennes ?

En réalité, WHEELS OF FIRE n'est pas un score original, c'est une musique qui a été réutilisée. La raison pour laquelle j'ai fait ces films, c'est qu'il s'agissait de productions à petit budget de Roger Corman tournées à l'étranger. Mais je n'ai jamais réellement travaillé en dehors d'Hollywood, je n'ai jamais eu d'appel de réalisateurs européens, par exemple.

FLOWERS IN THE ATTIC (1987)

En 1987, vous signez une musique envoûtante pour FLOWERS IN THE ATTIC, drame à suspense méconnu de Jeffrey Bloom. Comment avez-vous eu l'idée d'utiliser ces voix si mystérieuses tout au long du film ?

Le film avait été saupoudré de musiques temporaires de films d'horreur. C'était une erreur désastreuse : le film parle d'une jeune fille issue d'une famille de trois enfants martyrisés par leur mère et leur grand-mère, on est plutôt dans le mélodrame. Ça ne marchait pas vraiment. Ils m'ont donc engagé sans savoir ce qu'ils voulaient pour ce film. Mais je crois qu'ils souhaitaient décrire le point de vue des enfants dans le scénario. Il fallait donc exprimer la vision des enfants sur les événements. C'est une histoire tragique. Je crois me souvenir qu'avant la mort du père, on entend une boîte à musique. C'est ce qui leur rappellera toujours leur père. J'ai donc écrit le thème de cette boîte à musique en premier, qui est devenu le thème principal du film, aux cordes et à la flûte. J'ai tenté de garder cette innocence tout au long du score avec les voix. Je ne me rappelle plus très bien de cette musique mais ce thème est l'un de mes préférés.

HAUNTED SUMMER (1988)

Votre rencontre avec le tchécoslovaque Ivan Passer en 1988 vous a permit de signer une œuvre troublante et remarquable pour le drame HAUNTED SUMMER. L'ambiance envoûtante et sensuelle du film vous a inspiré l'une de vos plus noires partitions de la fin des années 80. Que pouvez-nous dire au sujet de cette sombre partition où vous avez renoué avec votre goût pour les ambiances atonales complexes et mis en avant l'utilisation des synthétiseurs ?

Le film était extraordinaire. Malheureusement ce fut un échec commercial. J'étais assez proche d'Ivan Passer, qui avait réalisé en 1981 un film important avec Jeff Bridges, CUTTER'S WAY. Ça m'a brisé le coeur de constater que le film n'avait pas marché, surtout pour lui, qui est un réalisateur doté d'un grand sens artistique. Pour ce film, j'ai écrit quelques démos sur des extraits du film. Sur le CD, c'est la piste 2, intitulée « Menage », grâce à laquelle j'ai eu le job. Eric Stoltz, l'acteur du film, a beaucoup aimé cette musique et a permis de me faire engager. Ivan quant à lui a insisté pour créer une atmosphère intemporelle, irréelle, d'où l'utilisation des synthétiseurs. Malgré tout, j'ai eu beaucoup de liberté sur ce film.

THE VAGRANT (1992)

Avec THE VAGRANT vous pouvez enfin composer une partition audacieuse et intrigante. Le film de Chris Walas et son humour macabre vous ont inspirés une musique étrange constitués de bruits en tout genre réalisés à partir de matériaux divers (jouets, couvercles de poubelle, etc.). Vous faites référence ici à la musique concrète du 20ème siècle, notamment aux travaux des deux pionniers du genre, Pierre Schaeffer et Pierre Henry...

C'est exact, en effet ! J'adorerai rencontrer Pierre Henry, j'ai beaucoup de ses musiques. Il y a un autre compositeur français d'électro-acoustique que j'adore, Luc Ferrari. Ce sont pour moi les compositeurs français les plus audacieux et les plus intéressants depuis Ravel et les romantiques. Bien sûr il y a eu Pierre Boulez mais sa musique n'a pas la même force, la même vie. Il y a du mouvement dans la musique de Schaeffer et d'Henry.

THE VAGRANT est le seul score que Jerry Goldsmith a clairement complimenté. Je crois qu'il l'a fait parce qu'il trouvait ça précisément différent. Que vous aimez cette musique ou non, c'était quelque chose, je pense, qui n'avait pas été fait auparavant dans la musique de film, notamment l'utilisation particulière des percussions et des respirations, que j'ai d'ailleurs faites moi-même ! Toute cette énergie et cette combinaison inhabituelle de sons m'excitaient beaucoup. Il n'y avait pas d'orchestre traditionnel, seulement un ensemble de musique de chambre : un quintette de cordes. Il y a aussi de l'accordéon, du marimba, du mélodica, du bass mélodica, de l'alto mélodica, ainsi qu'une machine à écrire...

Erik Satie a aussi utilisé une machine à écrire dans sa pièce « Parade »...

Ah bon ? Je ne savais pas... Connaissez-vous également Darius Milhaud ? C'était un ami d'Erik Satie, c'est un compositeur français que j'apprécie aussi beaucoup. Il a écrit une pièce pour piano que j'ai vraiment aimé, intitulée « Saudades do Brasil ». C'est très drôle et raffiné. Il a aussi écrit une pièce intitulée « Le boeuf sur le toit » : lorsque je suis allé à Paris il y a quelques années j'ai absolument voulu aller dans le restaurant qui porte aujourd'hui ce nom ! Je me souviens d'ailleurs y avoir vu là-bas l'une des plus belles femmes que j'ai pu rencontrer... Enfin bref.

JENNIFER 8 (1992)

1992 est aussi marqué par votre premier grand classique des années 90 : JENNIFER 8, score sinistre et captivant écrit pour le thriller de Bruce Robinson. JENNIFER 8 fait aussi partie de ces musiques qui ont forgés votre style de musique thriller des années 90. Avec le recul, quelle place occupe maintenant pour vous JENNIFER 8 dans votre carrière ?

Le film, à l'origine, avait été mis en musique par Maurice Jarre. Le réalisateur, Bruce Robinson, qui est anglais, voulait vraiment m'engager dès le début. Je n'ai pas entendu le score de Maurice mais ça n'a pas marché et le studio, qui ne me connaissait pas, a accepté de m'engager, puisque le réalisateur était avec moi. La musique temporaire du film était mon score pour THE FLY II, film où le montage avait été effectué en même temps que le précédent film de Bruce en 1989. Bruce avait alors entendu ma musique et avait dit : « qu'est-ce que c'est que ça ? ». C'est de cette façon qu'il avait découvert ma musique.

Pour JENNIFER 8, j'ai beaucoup utilisé le piano. C'était l'un de mes premiers films de suspense, où le personnage de Uma Thurman est pourchassé par un inconnu, et où celui d'Andy Garcia tente de la protéger parce qu'il tombe amoureux d'elle. C'est le premier thriller sur lequel j'ai travaillé, mais pour moi c'est une histoire d'amour. C'est pour ça qu'il y a du piano, pour cet aspect romantique de l'histoire. C'était assez nouveau pour moi.

On vous découvre un vrai sens de l'humour dans certaines de vos musiques, et plus particulièrement dans les titres parfois complètement farfelus des pistes de vos albums... Dans THE FLY II par exemple avec le morceau ‘Bartok Barbaro' où vous faites à la fois référence au nom du personnage du film de Chris Walas et à celui du compositeur Bela Bartok et à son oeuvre ‘Allegro Barbaro'. Même chose dans THE VAGRANT et bien d'autres...

Je ne suis pas le premier à faire ça... Vous connaissez le compositeur de LA PANTHÈRE ROSE ?

Henri Mancini ?

Bien sûr ! La plupart des morceaux de ses albums n'ont rien à voir avec le film ! Je trouve particulièrement ennuyeux de nommer les morceaux par se qu'on voit à l'image : « le tank », « le pont »... C'est stupide. Have fun ! De toute façon, quelle importance, ça dérange qui ? Ça c'est la première raison. La seconde, c'est que ça donne, je trouve, plus d'importance à la musique, ça lui enlève sa nature purement fonctionnelle. Certains compositeurs trouvent ça pompeux. Je n'en sais rien, mais moi ça m'amuse. Et traditionnellement, je cache le nom d'un compositeur dans un titre de morceau sur presque tous mes albums, comme celui de Komeda dans RUNAWAY JURY. Je fais ça depuis PRANKS !

COPYCAT (1996)

COPYCAT a marqué avec énergie votre retour aux musiques de thriller. Tout y est passé : cordes dissonantes, effets orchestraux avant-gardistes, sonorités électroniques étranges, thème mélancolique de piano, thème de cordes à la Bernard Herrmann, etc. Est-ce que, comme beaucoup de vos admirateurs, COPYCAT occupe pour vous une place de choix dans votre carrière ?

J'ai de bons souvenirs de COPYCAT. C'est le premier des quatre films que j'ai fait avec le réalisateur Jon Amiel. Nous avons fait COPYCAT en 1995, THE MAN WHO KNEW TOO LITTLE en 1997, ENTRAPMENT (HAUTE VOLTIGE) en 1999, et THE CORE (FUSION) en 2003. C'est clairement le réalisateur avec lequel j'ai entretenu une belle collaboration sur le long terme. C'est mon réalisateur préféré. La première raison qui le rend unique c'est qu'il aime la musique. A l'origine, le compositeur qui devait faire ce film était James Newton Howard. Mais à la dernière minute il a dû se désengager parce était qu'il avait une crise familiale : c'est la raison qu'il a donné. En réalité il a fait WATERWORLD ! Lorsqu'il a appris cela, Jon était en colère. Finalement je suis arrivé sur le film et Jon a été très content ! Ce que je retiens avant tout de ce film c'est que la relation avec Jon est unique : c'est un musicien lui-même, ou un ex-musicien. Il a étudié et joué de la cithare, il a même été compositeur de musique de scène. Il en maîtrise parfaitement l'expression dramatique. Il savait donc exactement ce qu'il voulait, comment utiliser la musique avec les effets sonores, tout en étant très ouvert à mes propositions (clusters, etc). Il aurait quasiment pu écrire la musique du film lui-même ! Il a adoré le score de COPYCAT et m'a dit : « Chris, tu as lu dans mon esprit : c'est exactement ce dont j'avais rêvé ! ». C'est le meilleur compliment qu'on puisse faire à un compositeur. C'est pour ça qu'on a continué à faire des films ensemble.

URBAN LEGEND (1998)

En écoutant votre partition pour le slasher URBAN LEGEND (1998), on peut ressentir tout le plaisir que vous semblez nous communiquer tout au long de cette superbe partition horrifique. Que pouvez-vous nous dire de plus au sujet de cette partition orchestrale ?

Je n'ai pas grands souvenirs de ce film. Le réalisateur, Jamie Blanks, est australien, et était très jeune à l'époque et c'était son premier film. Il m'a appelé un jour et m'a dit : « Chris, vous êtes la seule personne capable de faire la musique de ce film ». J'ai répondu : « Vraiment, vous aimez ma musique ? Alors je vous la fait gratuitement ! » (rires). Finalement je ne crois pas lui avoir fait la musique gratuitement mais j'ai beaucoup apprécié son enthousiasme sur ce film, surtout qu'il s'agissait d'un premier film. J'avais envie de faire du bon boulot parce que c'est un moment important pour tous ceux qui débutent comme lui. Il y a trois ou quatre morceaux de cette musique que j'apprécie beaucoup. C'était une belle expérience : au début le studio ne trouvait pas le film assez terrifiant, mais avec la musique ils ont dit que j'avais en quelque sorte sauvé le film ! C'était vraiment différent de tous les autres films d'horreur que j'ai fait. Malheureusement la carrière de Jamie n'a pas vraiment décollé, malgré son talent.

BLESS THE CHILD vous a inspiré l'une de vos plus belles partitions gothiques grandioses. Sur l'album, vous avez organisé les morceaux sous forme de suites réunies sous la forme d'un Requiem (Introitus, Kyrie Eleison, Dies Irae, Agnus Dei et Lux Aeterna). Le film parle d'ailleurs du combat entre le bien et le mal vu sous l'angle de la religion. Essayez-vous d'exprimer une quelconque foi personnelle sur ce film ?

En quelque sorte. L'idée au départ était de créer un album en crescendo. Je me suis demandé comment en faire quelque chose d'unique. Je voulais une progression douce, qui s'enchaîne agréablement, et la forme d'une messe en cinq parties s'est imposée naturellement, même si en contrepartie j'ai dû exclure l'un de mes morceaux favoris qui est le générique de fin (NDRL : morceau que Chris Young a fait écouter au public du festival lors de sa conférence). Et en effet ce fût l'occasion d'exprimer ma foi personnelle au même titre que le film parle de la foi. Cela avait du sens pour moi. Mais j'en retiens surtout que c'est le film pour lequel j'ai composé, je crois, mon générique de fin le plus inspiré. Clairement.

Petit retour sur MURDER IN THE FIRST en 1995, où vous dévoilez une autre facette moins connue de votre œuvre, plus lyrique, humaine et apaisée, pour le très beau film carcéral de Marc Rocco. On sent ici le sentiment de lamentation et de réflexion que l'on avait encore rarement entendu chez vous. Que retenez-vous de ce film ?

On m'a dit il y a quelques jours, et même encore pas plus tard qu'hier : « Chris, c'est ta meilleure musique, tu as créé pour ce film de superbes mélodies ». « Vraiment ? ». Je ne sais pas si c'est ma meilleure musique, mais les gens y sont sensibles. A l'époque je n'avais jamais fait de drame comme celui-ci, ou peut-être un ou deux drames mineurs. C'est pourquoi j'ai été assez surpris que le réalisateur me choisisse. Il avait aimé mon thème pour JENNIFER 8. D'ailleurs c'était une production franco-américaine, Canal+ produisait : beaucoup des producteurs de ce film étaient français. Bref, j'ai suivi l'équipe jusqu'à Alcatraz où le film était tourné, où j'ai pu ressentir les émotions nécessaires pour écrire cette musique. J'ai essayé d'en capter l'ambiance oppressante et d'en tirer quelque chose d'émouvant. La mélodie m'est venue en me remémorant mon enfance, un motif lointain que je chantais à l'église.

Avec NORMAN JEAN & MARILYN, vous faites une immersion réussie dans le registre du jazz. Ce genre musical semble vous coller à la peau tout au long de la seconde moitié des années 90 avec des partitions telles que THE MAN WHO KNEW TOO LITTLE (qui fait référence à Henry Mancini), mais aussi ROUNDERS, WONDER BOYS ou bien encore le très jazzy SHADE. Avez-vous fréquenté ou joué dans des orchestrez de jazz ?

Oui, j'ai été percussionniste de jazz avant d'être compositeur. Je faisais partie de deux jazz bands à l'université. J'ai toujours eu des affinités avec le jazz. Mon genre favori est le « big band », bien que je n'ai pas encore eu la chance d'en composer pour le cinéma. J'ai le jazz dans le sang, son sens du rythme, de l'orchestration. J'admire surtout la manière dont le temps y est séquencé. Certains compositeurs comme John Barry ou Howard Shore se sont bien approprié cette particularité. L'art du compositeur est de donner l'illusion de condenser le temps : avec une scène d'une minute trente, il suffit de mettre de la musique dessus pour la rendre deux fois plus longue. Souvent, les réalisateurs nous demandent de rendre une scène plus longue, ou plus courte, avec la musique. C'est un élément dramatique important, qui m'est devenu naturel à la longue. C'est aussi pourquoi le jazz s'est imposé au cinéma. Et mon expérience de percussionniste a changé la vision du tempo en musique.

Est-il important pour vous de varier les genres musicaux en musique de film, et comptez-vous encore continuer à explorer d'autres styles de musique (et de film) pour la suite de votre carrière au cinéma ?

On me catalogue facilement comme un compositeur de musique de film d'horreur. J'ai pourtant fait beaucoup d'autres genres : des drames, des films d'action, de la science-fiction, et même des films romantiques. J'ai déjà eu l'opportunité d'écrire une grande variété de styles, mais on continue à m'appeler pour faire des films d'horreurs. Et je vais sûrement continuer à en faire, j'espère en faire encore. Mais mon regret est de ne pas avoir eu l'occasion de faire suffisamment de films dramatiques ou romantiques pour être nominé aux Oscars ! Donc bien sûr je vais continuer à explorer les genres et les styles : un jour je ferai un film d'horreur et le lendemain la musique d'un film porno ! (rires)

Vous n'avez jamais composé pour un film d'animation...

En effet, peut-être simplement parce qu'aucun réalisateur de film d'animation ne pense à moi pour ce genre de film : je n'ai jamais eu l'occasion de leur prouver que je pouvais le faire. Mais pour MURDER IN THE FIRST non plus je n'avais jamais fait de film dramatique et pourtant j'ai eu le job ! J'aimerais bien faire un film d'animation mais même sans ça, c'est pas la fin du monde ! J'aimerais surtout faire davantage de comédies. Des comédies étranges, bizarres...

Et si vous deviez citer vos cinq compositeurs de musique de film préférées ? Et votre BO préférée ?

Je vous ai déjà parlé de Jerry Goldsmith, de Bernard Herrman, mais j'admire aussi David Raksin, Korngold... ça fait quatre... Difficile à dire. Je crois que mon album de musique de film préféré reste les musiques de films fantastiques de Bernard Herrmann. C'est ce qui m'a amené à la musique de film.

Et quelle est votre partition préférée de Christopher Young ?

Ah, la question piège ! Je dirais qu'elle n'existe pas encore. Pour le moment, le morceau dont je suis le plus fier est le générique d'ouverture de MURDER IN THE FIRST. C'est ma mélodie favorite. Pour son côté étrange et dérangeant, j'aime aussi beaucoup THE VAGRANT, et les parties électroniques de INVADERS FROM MARS. Ce sont les deux musiques que je considère comme mes plus imaginatives. Mais j'espère que le meilleur est à venir. Je dois vous avouer que j'ai l'ambition d'écrire un jour un thème dont tout le monde pourra se souvenir, comme celui de Trevor Jones pour LE DERNIER DES MOHICANS ou ceux de Max Steiner pour AUTANT EN EMPORTE LE VENT. La bonne mélodie pour le bon film. C'est un peu la quête de ma vie !

PRIEST (2011)

image compo

Comment vous êtes-vous retrouvé sur le film PRIEST ?

C.Y : Je me suis retrouvé à travailler sur ce projet parce que le réalisateur Scott Stewart était un grand fan de ma musique depuis pas mal d'années déjà, et j'ai également travaillé auparavant avec succès pour le studio Screen Gems. Scott est un fan de mélodie, et il était persuadé que je pouvais répondre au mieux aux enjeux dramatiques que l'on retrouve dans son film, en y apportant des thèmes mémorables.

Aviez-vous déjà entendu parler du jeu video "Blood" qui a inspiré le Manhwa (Comics Coréen) PRIEST à l'origine du film ?

C.Y : Jusqu'à aujourd'hui je n'avais aucune connaissance de ces antécédents, hormis que c'était les sources d'inspirations du film. Cela n'a pas eu d'impact direct sur la musique, Il en a été de même pour SPIDERMAN 3 et GHOST RIDER. Je n'ai pas eu de relations directes avec les matériaux d'origine. Je pense que cela est dû en partie au fait que le souhait du réalisateur était que mon inspiration soit directement influencée par leur interprétation du Comic, et non par le Comic original en lui-même.

C'est votre première collaboration avec le réalisateur Scott Charles Stewart (même si vous avez déjà travaillé auparavant avec le producteur, Sam Raimi). Est-ce que le réalisateur vous a donné des références ou des pistes à suivre ?

C.Y : Ma collaboration avec Scott a été au-delà de mes espérances. C'est un réalisateur fantastique, et il était capable de faire comprendre tout ce qu'il voulait. Il trouvait le bon équilibre entre être derrière vous pour vous indiquer la marche à suivre sans être pour autant toujours sur votre dos, un peu comme une ombre, qui a permis de réduire considérablement le processus d'écriture. Il connait très bien la musique, mais il n'interfère jamais sur les détails techniques. Il était juste un peu plus inquiet sur l'ampleur des idées musicales qui se bousculaient.

C'est un score martial, massif et dynamique avec de grands pans gothiques qui me
rappellent "Hellraiser", avec des envolées à la "Spiderman 3" et quelques parties horrifiques comme dans "Urban Legend", pourriez-vous nous expliquer votre vision "préhistorique" du Score que vous rapprochez de "Godzilla" ou "King Kong" ?

C.Y : En fait, le score a été indirectement influencé (parce que c'est une partie intégrante de mon vocabulaire musical) par ce genre de films. Dès que je me mets au travail sur un film, peu importe le genre, j'essaie d'en réinventer les rouages. Je n'essaie pas consciemment de faire référence à d'autres films. Je veux que la substance soit agréable à l'écoute. C'est inévitable que chaque score que je compose provienne de mon propre cerveau, c'est pour ça que l'on retrouve quelques relations. Il y a surement des similarités avec ces scores et d'autres comme DRAG ME TO HELL et THE CORE. Il y en a probablement d'autres encore.
J'ai bon espoir qu'il y ait suffisamment de tournures pour qu'il ait sa propre identité. Il n'y a pas eu d'effort volontaire de ma part pour que l'on reconnaisse musicalement certains de ces précédents films susmentionnés.

Ma vision principale pour la musique était de satisfaire aussi bien le réalisateur que Screen Gem (ndlr : Producteurs/Distributeurs). Musicalement, c'était un nouveau réalisateur, et il cherchait des thématiques mémorables. J'ai voulu lui offrir une nouvelle expérience que celles qu'il avait déjà vécues auparavant en lui fournissant des thèmes qui seraient instantanément reconnaissables. Il n'y avait rien de plus gratifiant que lorsque je faisais écouter à Scott mes choix pour le thème principal, et après avoir fini ma démo, de le voir humer l'air en signe d'approbation et me dire qu'il adorait le résultat. Rien ne me donne plus de satisfaction que lorsque l'audience réagit immédiatement à un thème ou que la progression d'un accord me permette d'obtenir le résultat escompté. Le fait que ce soit un film de science-fiction futuriste influe beaucoup sur sa sonorité. Très puissant, très gothique, avec un chœur qui l'entoure pour apporter encore plus de puissance.

Le chœur joue un rôle important dans la musique, parfois sous des accents plus religieux, parfois pour figurer un personnage, comment l'avez-vous utilisé ?

C.Y : Je n'ai pas vraiment utilisé le chœur de façon spécifique pour représenter tel ou tel concept, bien que je l'ai déjà fait par le passé, lorsque le chœur symbolise quelque chose de spécial que lui seul peut véhiculer musicalement. Sur SPECIES, j'ai décidé d'incorporer un chœur, et puisque c'était un alien femelle, j'ai utilisé un chœur de femmes. Inconsciemment, cela a sûrement altéré la perception du public de cette entité maléfique dans le film. Mais c'était une femelle belliqueuse. Dans PRIEST, ce n'était pas ce que je cherchais à faire avec le chœur. J'ai sélectionné un son de choral parce que je me suis dit que c'était parfait dans le contexte du film. Les chœurs ont été rajoutés afin de renforcer l'aspect christique de la musique.

La première fois que l'on entend vraiment le chœur, c'est lorsque l'on voit pour la première fois le visage du Prêtre joué par Paul Bettany, le thème est une chanson entonnée par le chœur. Ça arrive un peu comme des moines chantants. Il y a des moments dans le score où le chœur est utilisé pour recréer le son que l'on
entendrait dans une église. Mais la plupart du temps cela n'a rien à voir avec une église, c'est juste pour donner plus de densité, d'ampleur au son. J'ai utilisé un mélange de chœur masculin/féminin avec une soliste. Parfois cela sert juste à donner une musique plus "grosse", pour lui donner plus de poids. La voix de soliste apparait quand on voit pour la première fois la cathédrale de la cité, afin de donner un sentiment de solitude, de peine et de désespoir.

Que pouvez-vous nous dire sur votre première expérience sur le jeu vidéo "The Saboteur" ? D'autres projets en perspective dans ce même univers ?

C.Y : Mon expérience sur "Le Saboteur" a été extraordinaire. J'ai été contacté pour écrire un thème principal pour le jeu après que le reste du score ait été terminé. A cette occasion, ils avaient un score complet, mais je n'ai été consulté que pour le thème principal. Tout le monde a été très excité du résultat. Je n'ai rien fait d'autre depuis, mais j'adorerais y retravailler dans le futur. Je recherche de nouvelles opportunités dans l'univers du jeu vidéo.

Qu'est-ce qui serait pour vous le projet rêvé ? Celui dont vous pourriez dire que c'est votre chef-d'oeuvre !!

C.Y : En fait, je suis en ce moment dans un processus pour définir tout ça pour moi justement. Je suis fier du travail que j'ai fait jusqu'à maintenant, mais comme beaucoup d'autres compositeurs, j'en veux encore plus. Est-ce que mon chef d'œuvre sera composé pour un film, ou quelque chose en dehors de l'univers cinématographique ?? J'ai composé pour plus de 100 films mais je suis ouvert pour écrire pour un concert, Broadway, une chanson pop à la radio, ou quelque chose d'abstrait sans lien commercial potentiel, qui existera juste pour me rendre joyeux. Bien sûr j'ai toujours rêvé de succéder aux glorieux compositeurs américains tels que, Aaron Copeland ou Léonard Bernstein. S'il existait encore un phénomène comme ce fut le cas à "Tin Pan Alley" (Ndlr : nom donné, à New York, à la 28e Rue ouest, entre la Cinquième et la Sixième Avenue, où les éditeurs musicaux s'étaient regroupés vers la fin du xixe siècle et les musiciens jouaient généralement du piano dans la rue, donnant lieu à la musique populaire américaine de la fin du XIX siècle jusqu'au milieu du XX siècle), ce serait, je pense, ce que je voudrais faire. Je me sens sacrément chanceux, et je remercie le Seigneur de tout ce qui m'a été offert jusqu'aujourd'hui.

 

 

Entretiens réalisés en 2006 à Madrid par Quentin Billard et Sylvain Rivaud / en mai 2011 par Xavier Ducamp

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